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Clôture d’un compte – épargne d’un mineur – acte de disposition – accord préalable du juge de paix.

 

2012.1970

 

THEME

 

Clôture d’un compte – épargne d’un mineur – acte de disposition – accord préalable du juge de paix.

 

AVIS

 

Présents :
Messieurs A. Van Oevelen, Président;

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président;

Messieurs F. de Patoul, E. Struye de Swielande, N. Claeys, L. Jansen, membres.
Madame M. Mannès, membre.

 

Date : 23 juillet 2013

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

Le requérant et son épouse ont ouvert en 1999 auprès de la banque un livret d'épargne pour leur fille, née le 3 janvier 1998.

 

En août 2011, après le divorce, l'ex-épouse du requérant se rend à la banque, clôture le livret au nom de sa fille et se fait remettre les fonds en espèces. En juillet 2012, le requérant apprend par sa fille que les fonds provenant de la clôture du livret auraient servi à payer des vacances.

 

Point de vue du requérant

 

Peu de temps avant la clôture du livret, le requérant avait souhaité transférer les avoirs du compte d'épargne de sa fille sur un autre produit pour lequel il serait lui-même preneur d'assurance majeur et sa fille bénéficiaire mineure. Le requérant s'est vu répondre par la banque que la souscription d'un tel produit ne pouvait se faire sans l'accord de son ex-épouse; il ne comprend dès lors pas pourquoi la clôture du livret a pu intervenir sans son propre accord et estime que la responsabilité de la banque est engagée. Le requérant souhaite que les fonds remis à son ex-épouse soient reversés sur un livret au nom de sa fille.

 

Point de vue de la banque

 

La banque se prévaut du principe légal d'une part de l'autorité parentale conjointe, qu'elle estime valoir pour les actes d'administration et de disposition des biens du mineur et ce, que les parents vivent ensemble ou séparément, et d'autre part de la présomption d'accord entre eux, à l'égard des tiers. A défaut de communication par le requérant d'une quelconque dissension entre lui et son ex-épouse, la banque estime que cette présomption valait toujours au moment de la clôture du livret, l'ex-épouse étant présumée agir avec l'accord du requérant.

 

La banque justifie le régime différent lié au produit d'assurance évoqué par le requérant en précisant que dans ce cas les fonds sont transférés du patrimoine du mineur au patrimoine d'un représentant légal majeur, ce qui requiert en réalité l'autorisation du juge de paix.

 

La banque estime que sa responsabilité n'est pas engagée.

 

II. AVIS DU COLLEGE

 

La clôture et la liquidation des avoirs en compte d'épargne au nom d'un mineur constituent un acte intrinsèque de disposition car emportant aliénation des biens du mineur.

 

Le Collège ne peut suivre l'argument de la banque selon lequel la présomption d'accord des deux parents pourrait porter sur un tel acte d'aliénation et estime qu'au contraire cette présomption ne porte que sur les actes liés à la personne du mineur et à l'administration de ses biens. Les actes de disposition des biens du mineur ne sont non seulement pas couverts par la présomption d'accord des deux parents mais ils sont en outre exclus des prérogatives des parents. Les articles 378 et 410, § 1er, du Code Civil stipulent en effet expressément qu'il est interdit d'aliéner les biens de l'enfant mineur sans le consentement du Juge de Paix.

 

Le Collège relève par ailleurs que la position de la banque est en contradiction avec un arrêt de la Cour de Cassation du 14 janvier 1981 qui précise que les pouvoirs attribués par la loi à l'un ou à l'autre des père et mère sur les biens de leurs enfants mineurs sont toujours des pouvoirs d'administration, ce qui exclut celui d'accomplir des actes intrinsèquement de disposition.

 

Le Collège estime que la responsabilité de la banque est engagée.

 

III. CONCLUSION

 

La demande du requérant est recevable et fondée.

 

Le Collège invite la banque à reverser les fonds liquidés en mains de l'ex-épouse du requérant sur un livret au nom de sa fille mineure, sous bonne valeur au jour de la liquidation.

 

La banque n’a pas suivi l’avis du Collège.