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Compte à vue – facilité de caisse – insaisissabilité d’allocations familiales.

2010.0489

 

THEME

 

Compte à vue – facilité de caisse – insaisissabilité d’allocations familiales.

 

AVIS

 

Présents :


Messieurs A. Van Oevelen, Président;

 

Messieurs F. de Patoul, P. Drogné, N. Claeys, W. Van Cauwelaert, membres.

 

Date : 16 novembre 2010

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

La requérante était titulaire d’un compte à vue auprès de la banque.

 

Le 7 août 2009, sa caisse d’allocations familiales lui verse les allocations dues pour ses trois enfants majorées de la prime pour la rentrée scolaire. Le 10 août 2008, la requérante veut retirer la somme pour faire face aux frais de rentrée. Elle apprend alors que son compte est bloqué en raison d’un découvert irrégulier figurant sur un autre compte ouvert avec son mari. Ce débit provient de l’utilisation d’une ligne de crédit ouverte au nom de la requérante et de son mari dont elle est alors séparée.

 

Elle prend alors contact avec le service contentieux de la banque afin de pouvoir retirer le montant des allocations familiales mais en vain. La requérante déclare qu’ensuite elle a eu beaucoup de peine à suivre l’évolution de son compte puisque la banque lui avait retiré sa carte magnétique.

 

Le 13 novembre 2009, la requérante apprend que la banque a prélevé le montant de ses allocations familiales du mois d’août pour en créditer le compte en débit irrégulier.

 

La requérante estime qu’en bloquant le paiement des allocations familiales, la banque a violé les dispositions légales assurant l’insaisissabilité des allocations familiales même en cas de paiement en compte à vue.

 

La banque admet que le versement de 904,52 € a été effectué le 7 août 2009 avec le code C de manière telle qu’elle n’ignorait pas qu’il s’agissait d’allocations familiales. Elle confirme avoir bloqué le compte de la requérante en raison du solde débiteur irrégulier d’un autre compte. Elle invoque à cet égard l’article 21.5. de son règlement général des opérations qui autorise la banque à bloquer le solde d’un compte pour des raisons légitimes et pour une période déterminée. Elle admet avoir ensuite prélevé 1.000 € sur base des articles 21.1 et 21.2 de ce même règlement qui autorisent les compensations entre plusieurs comptes.

 

La banque estime n’avoir effectué le 7 août 2009 ni saisie ni cession sur le compte de la requérante et qu’il ne peut donc lui être reproché d’avoir enfreint les dispositions des articles 1409, 1409bis, 1410 et 1411bis du Code judiciaire.

 

La banque considère en outre qu’elle était autorisée à compenser le 13 novembre 2009, dès lors que les travaux préparatoires de la loi du 14 juin 2004 (ultérieurement adaptée par la loi du 27 décembre 2005) montrent que la compensation est une hypothèse qui a été expressément exclue des mesures de protection des sommes incessibles et insaisissables versées en compte à vue.

 

La banque relève de manière superfétatoire que la protection des avoirs versés en compte est limitée à 30 jours et que ce délai était largement écarté lorsqu’elle a prélevé la somme de 1.000 € à titre de compensation.

 

II. AVIS DU COLLEGE DE MEDIATION

 

Le Collège s’est prononcé dans un cas similaire par un avis du 28 octobre 2008 (2008.0815). Dans ce cas, le montant alloué pour une pension de vieillesse avait été compensé avec un débit provenant de l’utilisation d’une carte accréditive. En l’espèce, le Collège avait considéré que la compensation était interdite sur base de l’article 1293, 3° du Code civil.

 

Le Collège constate qu’en l’espèce, la banque a procédé d’abord au blocage du compte. Cette mesure ne peut s’analyser que comme une forme de saisie privée dont l’effet est identique à celui d’une saisie conservatoire effectuée en vertu d’une décision judiciaire.

 

A supposer que pareille clause soit licite, elle ne peut avoir pour effet de rendre légitime une mesure par ailleurs interdite par un texte impératif sinon d’ordre public qui s’applique, même lorsque la saisie est effectuée en vertu d’une décision judiciaire.

 

Le blocage opéré par la banque était objectivement illégal dès lors qu’elle avait été avisée de la nature des sommes versées et donc de la protection organisée par la loi.

 

La banque ne pouvait ultérieurement compenser sa créance avec des sommes qu’elle avait retenues en fraude de la loi.

 

III. CONCLUSION

 

La plainte de la requérante est recevable et fondée. Le collège invite la Banque à restituer à la requérante une somme de 904,52 € euros majorée des intérêts au taux légal depuis le 7 août 2009.

 

La banque a suivi l’avis du Collège.