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Conseil en placement – branche 23 – compatibilité avec le profil d’investisseur.

 

2014.2002

 

THEME

 

Conseil en placement – branche 23 – compatibilité avec le profil d’investisseur.

 

AVIS

 

Présents :
Monsieur A. Van Oevelen, Président;

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président;

Messieurs F. de Patoul, E. Struye de Swielande, N. Claeys, L. Jansen, membres
Madame M. Mannès, membre.

 

Date : 17 mars 2015

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

1. FAIT ET OBJET DE LA CONTESTATION

 

Dans le cadre d’un plan d’investissement relevant d’un contrat d’assurance-vie individuelle de la Branche 23, le requérant a la possibilité d’investir dans un large éventail de fonds en fonction de son profil de risque. Le souscripteur du contrat assume le risque financier de son investissement dont le rendement est exclusivement lié aux prestations des fonds choisis dans la gamme des fonds proposés, étant entendu qu’aucun des fonds proposés ne bénéficie ni d’une garantie de capital, ni d’une garantie de rendement. Par ailleurs, l’assureur n’attribue aucun droit à une éventuelle participation bénéficiaire au souscripteur du contrat.

 

En juin 1998, le requérant verse une prime de conclusion de € 69.953,32 augmentée de 3% de frais d’entrée. La prime de conclusion est entièrement investie dans le fonds X. Ce fonds qui vise à une répartition mondiale des actifs représentés par 75% d’obligations et 25% d’actions, appartient à la classe de risque 1 et peut être intégré dans des portefeuilles dont le profil de risque a été qualifié de conservateur ou de défensif. Une commission de gestion de 1% est imputée annuellement sur la valeur du contrat.

 

Conformément aux dispositions régissant son contrat d’assurance-vie individuelle, le requérant  demande, en novembre 2009, le transfert de la valeur totale de ces unités dans le fonds X pour l’acquisition d’unités dans le fonds Y. Ce transfert s’effectue sans frais pour une valeur de € 83.691,73. Ce fonds est investi de manière diversifiée dans des obligations européennes dont une très large part appartient à la classe « Investment grade ». Il est affecté d’une classe de risque 1, ce qui l’autorise à faire partie de portefeuilles à caractère conservateur ou défensif. Une commission de gestion de 1% est imputée annuellement sur la valeur du contrat.

 

Lors de la demande de transfert évoquée ci-dessus, le profil d’investisseur du requérant est formellement établi à l’appui d’un questionnaire couvrant sa situation financière, ses objectifs, ses connaissances et expériences en matière de produits financiers ainsi que les risques qu’il est disposé à assumer. Au terme de ce questionnaire, le requérant marque son accord sur le profil d’investisseur « défensif » qui lui est recommandé par la banque.

 

En février 2011, le requérant demande le transfert de la valeur totale de ces unités dans le fonds Y pour l’acquisition, chaque fois à hauteur de 25% du montant transféré, d’unités dans les fonds X. Ces fonds dont la répartition des actifs sous-jacents est mondiale, visent à investir de manière très diversifiée dans les marchés d’obligations (75%) et d’actions (25%), et accessoirement en liquidités. De plus, pour un profil défensif, l’objectif non-garanti de ces fonds est de limiter la performance négative à maximum 5% par an de la valeur de référence. En investissant dans quatre fonds dont la date de valeur de référence est fixée au départ de chaque trimestre, on cherche à lisser le risque lié à une entrée et/ou sortie du fonds qui ne baserait la valeur de référence annuelle que sur une seule valeur d’inventaire. Ces fonds sont affectés d’une classe de risque 1, ce qui les autorise à être intégrés dans des portefeuilles à caractère conservateur et défensif. Une commission de gestion annuelle de maximum 2% est à charge de la valeur des fonds.

 

Lorsque l’objectif du fonds est de ne pas dépasser une performance annuelle négative déterminée, la gestion du fonds consiste, essentiellement sur base de modèles quantitatifs, à ajuster de manière régulière l’exposition aux actifs risqués du fonds avec pour résultat de diminuer sensiblement la part de ces actifs lorsque les marchés sous-jacents performent mal, et d’augmenter la part des mêmes actifs en cas de mouvement haussier afin de tenter d’égaler le rendement de l’indice de référence du fonds. La fréquence et l’ampleur des ajustements affectant la part des actifs risqués sont étroitement liées, non seulement à la tendance des marchés sous-jacents, mais aussi au niveau de volatilité de ces marchés ainsi qu’au seuil de protection recherché.

 

En juin 2014, le requérant demande le rachat de toutes les unités qu’il détient dans les fonds X, ce qui conduit à une valeur versée sur son contrat de € 84.156,02 et représente une perte de 3,20% par rapport à la somme investie en février 2011.

 

2. POINT DE VUES DES PARTIES

 

En juin 2014, le requérant interpelle directement l’agence bancaire où il détient son compte courant pour faire part de son insatisfaction et poser des questions. Deux mois plus tard, dans un courrier adressé à la banque, il fait état de deux griefs :

 

-      de manière générale, il reproche à la banque une gestion défaillante de son investissement de base réalisé en 1998 dès lors que la valeur de rachat de son contrat d’assurance-vie individuelle, en juin 2014, aurait dû atteindre un montant supérieur de 16% par rapport à la valeur de rachat effective, et cela compte tenu de l’inflation sur la période d’investissement considérée;

 

-      de manière plus spécifique, il se dit avoir été trompé par la banque en ce qui concerne son investissement dans le fonds X sur lequel son choix s’était arrêté en raison de son souhait de ne plus être investi dans un fonds uniquement à composante obligataire. Selon lui, le fonds Y prévoyait un investissement en actions à hauteur de 25% alors que la part de cette classe d’actifs risqués est restée de manière prolongée bien en deçà de ce seuil annoncé. Il observe par ailleurs que les actifs obligataires ont pour leur part aussi été en retrait par rapport à l’objectif de 75% annoncé pour cette classe d’actifs. La faible part des actifs risqués au sein du fonds a, selon le requérant, eu pour effet de le dénaturer à plusieurs reprises et constitue l’explication majeure de sa performance négative (-3,20%) au cours de la période où il a été détenu.

 

Considérant avoir subi un dommage pour les deux raisons évoquées, le requérant a demandé à la banque de lui faire une proposition d’indemnité.

 

Dans deux courriers explicatifs adressés au requérant les 30 juin et 10 septembre 2014, la banque ne donne pas suite à sa demande d’indemnisation et met uniquement en avant les différents éléments explicatifs de la faible performance du fonds X :

 

-      la gamme des fonds S a la particularité d’être assortie d’un objectif de défense contre les marchés baissiers. En l’espèce, les fonds choisis visaient à protéger la valeur de la part investie à hauteur de 95% de la valeur relevée en début de chaque année de référence;

 

-      l’objectif de protection des fonds S est compatible, dans des conditions neutres de marché et dans une optique d’investissement à moyen terme, avec un investissement en actifs risqués obligataires et actions à hauteur de 75% et 25%, respectivement;

 

-      les gestionnaires des Fonds S disposent d’une flexibilité totale quant au poids des actifs risqués à détenir. Lorsque les conditions de marché conduisent à ce que le respect de l’objectif de protection visée s’impose de manière plus contraignante, les gestionnaires sont amenés à réduire, parfois de manière importante, la part des actifs risqués au profit des liquidités ou quasi-liquidités.

 

-      Les fonds S ont été exposés à un contexte de gestion difficile en 2013 en raison d’une surpondération d’actifs risqués (obligations et actions) des pays émergents qui ont largement sous-performé, d’une part, et aussi en raison de la volatilité importante que tous les marchés ont enregistrée suite aux annonces de la Federal Reserve américaine, d’autre part. Ce sont ces éléments qui ont conduit les Fonds S à affecter une part prépondérante à des liquidités.

 

La banque conclut que sa responsabilité ne peut pas être mise en cause en raison de la caractéristique particulièrement défensive des fonds S qui cadrait du reste parfaitement avec le profil d’investisseur du requérant.

 

II. AVIS DU COLLEGE

 

Le Collège observe avant tout que dès la conclusion du contrat d’assurance-vie individuelle, tous les produits d’investissements retenus étaient compatibles avec un profil d’investisseur défensif. Il observe par ailleurs que le profil d’investisseur établi de manière formelle en 2009 confirme de manière indiscutable le profil d’investisseur défensif du requérant.

 

S’agissant du dommage chiffré par le requérant à l’équivalent d’une perte de 16% de son investissement en référence à une valeur théorique qu’il aurait dû atteindre en 2014 compte tenu de l’inflation, le Collège, au-delà de son interrogation quant à la validité d’un tel raisonnement comparatif, constate que cette estimation du dommage est sans lien avec les griefs avancés pour expliquer la mauvaise performance des fonds S entre février 2011 et juin 2014; ces fonds ont donné lieu à un rendement négatif de 3,20% au terme de leur période de détention, chiffre largement inférieur à celui évoqué comme dommage par le requérant.

 

Le Collège ne peut pas rejoindre l’argumentation du requérant quant au caractère contraignant d’une détention continue de 25% d’actions dans les fonds S. Ce pourcentage est nécessairement amené à fluctuer, parfois dans des proportions importantes et à plusieurs reprises, dès lors que la priorité de ces fonds est d’assurer l’objectif de protection de capital promis à l’investisseur. Même s’il existe des motifs conduisant à être insatisfaits au sujet de la piètre performance des fonds S, le Collège reconnait que cette performance a été tributaire des conditions de marché défavorables et non la résultante d’une gestion qui n’aurait pas été conforme à la finalité du produit d’investissement.

 

De manière accessoire, le Collège regrette que la banque ait passé sous silence les raisons de la mauvaise performance des fonds S en 2011 alors que cette année a pesé plus lourdement sur leur performance négative que celle enregistrée en 2013. Le Collège reconnait par ailleurs que la hauteur des frais de gestion décomptés par les fonds a significativement affecté leur performance.

 

III. CONCLUSION

 

Le Collège considère la plainte comme recevable mais non fondée, dès lors qu’aucun lien de causalité ne peut être établi entre le dommage avancé par le requérant et la gestion des fonds S par la banque.