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Conseil en placement – garantie en capital

2011.1896

 

THEME

 

Conseil en placement – garantie en capital.

 

AVIS

 

Présents :
Messieurs A. Van Oevelen, Président;

Madame  M.-F. Carlier, Vice-Président;

Messieurs F. de Patoul, E. Struye de Swielande, N. Claeys, L. Jansen, membres.

Mesdames M. Mannès, N. Spruyt, membres.

 

Date : 27 mars 2012

 

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

Le requérant âgé d’une cinquantaine d’années est un journaliste travaillant pour compte d’une agence de presse italienne. Il est client de la banque depuis quelques années. En juillet 2011, il dispose d’avoirs composés à raison de 157.477,16 euros en carnet d’épargne et de 10.821,68 euros en compte courant.

 

Le 13 juillet 2011, il se présente à la banque et transforme les avoirs de son carnet d’épargne en un investissement dans 4 produits financiers qui lui ont été proposés par la banque.

 

Le requérant déclare avoir explicitement demandé si les produits financiers bénéficiaient d’une garantie en capital et il affirme que le préposé de la banque lui a répondu par l’affirmative. Il déclare qu’à défaut, il n’aurait jamais souscrit ces valeurs.

 

Au début du mois d’octobre 2011, il s’est aperçu que ces valeurs comportaient un risque financier et il a immédiatement demandé à la banque de lui restituer les fonds investis sur base des informations inexactes qu’il dit avoir reçues de la banque.

 

La banque de son côté conteste radicalement les affirmations du requérant et relève que son préposé a passé 45 minutes à exposer le fonctionnement des produits financiers proposés au moyen de fiches explicatives. La banque déclare que le client a pu prendre le temps d’examiner ces fiches. A aucun moment, selon la banque, il ne lui a été affirmé que les produits financiers proposés comportent une garantie en capital.

 

La banque souligne que le requérant a des revenus mensuels supérieurs à 5.000 euros et que d’après les mouvements de son compte, les avoirs dont il dispose à la banque ne sont qu’une partie de sa fortune personnelle. La banque produit en outre un formulaire de profil dont il résulte que la stratégie d’investissement du requérant est une stratégie défensive (maximum 25% en actions et produits dérivés, soit une position intermédiaire entre une stratégie conservatrice (pas d’actions ni de produits dérivés) et une stratégie neutre (maximum 50% d’actions et/ou de produits dérivés).

 

La banque souligne que les produits financiers proposés comportent un risque évalué à 2 sur une échelle de 0 à 8 et elle conclut que ces produits étaient adéquats compte tenu de la stratégie déduite du profil.

 

II. AVIS DU COLLEGE DE MEDIATION

 

A. La langue de la procédure

 

Le Collège constate que le requérant s’adresse en anglais au service de médiation et que la banque correspond en néerlandais.

 

Le Collège considère qu’en cas de divergence linguistique, la procédure - et donc l’avis à rendre - doivent se dérouler dans la langue du plaignant, pour autant qu’il s’agisse d’une des trois langues nationales même si, dans la mesure de ses capacités, le service accepte des communications de plaignants dans d’autres langues étrangères.

 

En l’espèce, le plaignant s’adresse en anglais, le profil a été complété en anglais mais les ordres de souscription des valeurs sont signés en français.

 

Dans cette mesure, l’avis sera rendu en français, langue nationale qui paraît la plus intelligible pour le plaignant.

 

B. Sur le fond

 

Le différend repose sur des déclarations contradictoires des parties en manière telle que le Collège ne peut se fonder que sur les règles de droit et les documents produits par les parties.

 

La banque a fourni un conseil en investissement. Conformément à l’article 27, § 4, de la loi du 2 août 2002, avant de fournir ce conseil, la banque est tenue de s’informer sur les connaissances, l’expérience, la situation financière et les objectifs d’investissements du client.

 

C’est à la banque qu’incombe la responsabilité de poser les questions adéquates pour déterminer les produits qu’elle peut recommander à son client.

 

Le formulaire de profil précise que l’investissement du client représente environ 32% de sa situation patrimoniale totale, que l’horizon de placement est inférieur à 3 ans, qu’une dépense très importante est prévue dans les 5 ans et le requérant déclare préférer les investissements avec protection de capital.

 

Il n’a par ailleurs fourni aucune réponse aux questions 7 et 8 relatives à sa réaction en cas de perte en capital, comme si cette hypothèse n’était pas envisageable.

 

Enfin, interrogé sur ses connaissances, le requérant déclare qu’il n’a acheté que des fonds avec protection de capital ou des produits structurés (fund with capital protection (fixed funds) or stuctured notes).

 

Le profil mentionne également que le requérant a coché la réponse suivante : Je suis les marchés financiers. Par exemple, je travaille pour une institution financière ou une société de bourse ou au département financier d’une société. Le requérant déclare cependant qu’il n’a pas complété le formulaire lui-même et affirme qu’en tout état de cause, il est journaliste et ne suit pas les questions financières.

 

A supposer que les réponses apportées soient contradictoires, il incombait à la banque de les faire préciser ou de demander des précisions complémentaires. En l’espèce et compte tenu de l’historique du client auprès de la banque, des objectifs de placement à court terme révélés par le profil et de la préférence signalée pour les produits avec protection en capital, le Collège considère que la banque était tenue de classer le requérant parmi les investisseurs conservateurs c’est-à-dire ceux pour lesquels elle ne peut recommander que des produits avec protection du capital.

 

En l’espèce, l’objectif de placement est clairement précisé par le formulaire et le fait que le client disposerait de connaissances financières - ce qui ne ressort d’aucune autre pièce - ne peut pas avoir d’incidence sur l’objectif de placement déclaré. Un professionnel averti peut parfaitement choisir de constituer un portefeuille totalement conservateur.

 

Le document signé par le requérant précise certes que le client accepte le profil de risque recommandé par la banque (soit défensif en l’espèce). Cette disposition paraît cependant contraire à l’article 74, 21° de la loi du 6 avril 2010 sur les pratiques du marché et la protection des consommateurs du 6 avril 2010 en ce qu’elle tend à réduire les moyens de preuve du consommateur qui ne pourrait plus remettre en cause l’erreur de la banque.

 

Au vu du profil et circonstances de l’espèce, le Collège estime donc que la plainte du requérant est recevable et fondée.

 

III. CONCLUSION

 

Le Collège invite la banque à restituer au requérant la totalité des fonds utilisés pour les investissements en ce compris les frais prélevés, majorés d’un intérêt correspondant au taux du carnet d’épargne depuis la date des prélèvements.

 

La banque n’a pas suivi l’avis du Collège.