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Cours limite pour la vente d'obligations - cours présumé atteint - non exécution de l'ordre.

2013.1987

 

THEME

 

Cours limite pour la vente d'obligations - cours présumé atteint - non exécution de l'ordre.

 

AVIS

 

Présents :
Monsieur A. Van Oevelen, Président;

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président;

Messieurs F. de Patoul, E. Struye de Swielande, Y. Evenepoel, L. Jansen, membres.
Madame M. Mannès, membre.

 

Date : 17 juin 2014

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

Le 8 octobre 2013, le requérant place auprès d’une agence de la banque un ordre de vente portant sur des obligations « X » pour un montant nominal de € 25.000. Ces obligations sont inscrites au compte- titres dont le requérant est titulaire auprès de la banque.

 

Lors de la passation de l’ordre de vente aux guichets de l’agence bancaire, le requérant précise qu’il fixe un cours limite de 104% pour la vente. Le choix de ce niveau de cours  repose sur le constat que, depuis plusieurs jours et de manière très stable, un cours supérieur à 104% est repris par la banque dans le cadre du relevé estimatif de portefeuille du requérant. Le requérant estime qu’en fixant une limite à 104%, l’ordre de vente pouvait en toute logique être exécuté le jour même.

 

L’ordre de vente n’a fait l’objet d’aucune exécution, la banque précisant que les cours acheteurs dans le marché ne permettaient pas de rencontrer la limite fixée par le requérant.

 

Point de vue du requérant

 

Le requérant s’étonne que la vente n’ait pas été exécutée le 8 octobre à la limite convenue, et ce d’autant plus que le relevé estimatif de son portefeuille établi le lendemain affiche un cours de 104.08% pour l’obligation concernée par l’ordre. Il conclut à un dysfonctionnement, voire à une manipulation de cours dans le chef de la banque au départ d’une information de prix dont le client peut raisonnablement croire qu’elle est représentative du marché.

 

Point de vue de la banque

 

La banque signale tout d’abord que les cours repris dans les relevés estimatifs des comptes-titres ont une valeur purement indicative; ils sont transmis par des fournisseurs spécialisés dans la collecte et la diffusion d’informations financières, mais ne sont pas nécessairement représentatifs de prix auxquels des transactions ont réellement été négociées sur le marché.

 

La banque précise par ailleurs à Ombudsfin que si des organes de diffusion, tels que Bloomberg, affichent des informations dont on pourrait déduire que le cours de l’obligation « X » se situe dans la zone de 105.50% entre les 7 et 11 octobre, il s’agit en l’espèce d’une estimation de valorisation de prix obligataires générée par un modèle de calcul conçu au départ de données observées en matière la qualité de crédit de débiteurs présentant des caractéristiques similaires à celles de l’obligation « X ». De telles valorisations ne peuvent en aucun cas être assimilées à des transactions réelles dans le marché, a fortiori pour l’obligation « X » dont les volumes traités sont très restreints. Elles ne prennent au surplus pas en compte le fait que le marché traite avec une marge entre les cours acheteur et vendeur de l’obligation.

 

La banque ajoute que si un contact préalable avait été pris avec la salle de marché, le requérant aurait reçu l’information que son ordre ne pouvait, à ce moment-là, être exécuté à la limite fixée.

 

Pour preuve de cette, la banque fournit les informations complémentaires suivantes :

 

(a)      copie de l’écran Bloomberg reprenant les prix de clôture des prix de l’obligation que la banque transmet à titre de teneur de marché. Les prix couvrent la période du 11 octobre au 27 novembre 2013, et aucun d’eux n’affiche un cours égal ou supérieur à 104%. En raison d’un problème technique interne, la banque n’est toutefois pas en mesure d’étendre cette information pour y inclure les dates des 8 au 10 octobre;

 

(b)      copie d’un relevé (quantité + prix) des transactions de rachat de l’obligation « X » exécutées par la banque entre le 8 octobre et 31 décembre 2013. Toutes les transactions de rachat sur cette période se sont réalisées au sein de la banque à des cours compris entre 103,55% et 101,95%.

 

II. AVIS DU COLLEGE

 

Le Collège observe que l’obligation litigieuse ne fait pas l’objet d’une négociation organisée sur un marché réglementé ou sur une plateforme MTF. Il en résulte que la négociation de cette obligation ne se réalise pas sur base d’un carnet d’ordres transparent publiant en continu les prix et quantités des offres et des demandes, mais bien dans le cadre moins structuré d’un marché de gré à gré sur lequel interviennent certaines banques en fonction de leur intérêt et aux prix auxquels elles sont disposées, pour des quantités déterminées, à se porter à l’achat ou à la vente.

 

En raison de la liquidité très restreinte de l’obligation litigieuse, le Collège reconnaît que la valorisation dont font état les relevés estimatifs du compte-titres du requérant peuvent revêtir un caractère approximatif et, pour cette raison, ne pas constituer nécessairement une référence indiscutable quant au prix précis auquel une transaction devrait pouvoir être négociée sur le marché. En outre, toujours en raison de la liquidité restreinte de cet instrument financier, les opérateurs sur les marchés de gré à gré appliquent une marge entre cours acheteur et vendeur qui est fonction de la taille de l’ordre et qui, en l’espèce, est souvent de l’ordre de 1%. Il est donc possible qu’avec un cours de référence légèrement au-dessus de 104% tel que repris dans les relevés estimatifs, les cours acheteurs soient en réalité situés à des niveaux inférieurs au cours limite donné.

 

Compte tenu des éléments invoqués ci-dessus, le Collège ne peut que regretter que le requérant n’ait pas, avec l’assistance de l’employée de l’agence bancaire, pris la peine de vérifier auprès des opérateurs de la banque si l’ordre avait des chances d’être exécuté au prix limite indiqué.

 

Le Collège regrette tout autant l’argumentation péremptoire de la banque qui se base exclusivement sur des données internes, parfois incomplètes, omettant de cette manière d’apporter des preuves qu’elle pouvait réunir par ailleurs et qui auraient démontré que d’autres intervenants sur le marché n’étaient pas en mesure de procéder à l’exécution de l’ordre au prix limite.

 

Le Collège observe toutefois que le préjudice du requérant n’est pas établi. Pour autant que la vente n’ait toujours pas eu lieu, le cours de l’obligation concernée reste centré à ce jour autour de 104% alors par ailleurs que l’obligation litigieuse produits des intérêts  à 4pct. brut.

 

III. CONCLUSION

 

Le Collège considère la plainte comme recevable mais non fondée à défaut de préjudice établi.