Vorige

Crédit à la consommation – dénonciation du crédit – codébiteurs solidaires – règlement collectif de dettes.

 

2015.2677

 

THEME

 

Crédit à la consommation – dénonciation du crédit – codébiteurs solidaires – règlement collectif de dettes.

 

AVIS

 

Présents :
Monsieur A. Van Oevelen, Président;

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président;

Messieurs E. Struye de Swielande, L. Jansen, membres
Mesdames M. Mannès, N. Spruyt, membres.

 

Date : 15 décembre 2015 – avis approuvé le 21 décembre 2015

 

I. OBJET DE LA PLAINTE

 

Le 22 février 2012, le requérant a conclu en qualité de co-emprunteur, un prêt à tempérament avec Madame X, dans un but de trésorerie en faveur de Madame X, pour un montant de 15.001€ moyennant le paiement mensuel d’une somme de 252,71€ pendant une durée de 84 mois.

 

Madame X et le requérant ne sont pas domiciliés à la même adresse, ne résident pas ensemble, ne sont ni liés par le lien du mariage ni par le lien de la cohabitation. Le requérant pensait avoir conclu ce contrat en sa qualité de garant, comme il lui a été indiqué par l’agence au moment de la signature du contrat, afin d‘aider Madame X. Cette dernière prenait en charge le paiement des mensualités.

 

Une assurance-vie a été souscrite à la conclusion de ce contrat par Madame X, seule, et elle a reçu seule la somme empruntée. Par ailleurs, Madame X a toujours remboursé les mensualités jusqu’à son admission en règlement collectif de dettes. Le requérant déclare n’avoir pas reçu ni de lettre recommandée de rappel de paiement, ni de notification de l’admission de règlement collectif de dettes de Madame X par jugement de juin 2015.

 

En revanche, la cession de créance de la banque au profit de la société de recouvrement en date du 8/07/2015 -conséquence immédiate de l’admissibilité en règlement collectif de dettes de Madame X- a été notifiée au requérant alors qu’il n’y avait qu’un seul retard de paiement et que ni Madame X ni le requérant n’a été avisés de ce retard par lettre recommandée.

 

Le requérant considère que cette dénonciation entrainant la perte du bénéfice de l’échelonnement des paiements ainsi que son fichage négatif à la Centrale des Particuliers ne se fondent sur aucune disposition légale ou conventionnelle et partant sont illégaux.

 

II. POSITION  DE LA BANQUE

 

Pour la banque, il y a lieu de considérer, par analogie avec la procédure de faillite, que la décision d’admissibilité en règlement collectif de dettes a pour conséquence la dénonciation automatique du contrat et la perte du bénéfice de l’échelonnement des paiements pour les crédits en cours. Elle se fonde sur la position d’une certaine doctrine ( E. Dirix et P.Taelman, et J.Beliën).

 

Par ailleurs, la banque soutient que le fichage négatif à la Centrale des Particuliers se fait sur base d’un contrat en cas d’admissibilité en règlement collectif de dettes et non sur base personnelle du consommateur. Dès lors, si elle procède à la radiation du fichage du contrat, cela entraine la radiation du fichage des deux consommateurs, raison pour laquelle elle maintient le fichage.

 

III. AVIS DES EXPERTS

 

Le prêteur dispose de deux codébiteurs solidaires. Le fait que l’un d’eux est admis en règlement collectif n’entraîne pas, de facto, l’exigibilité immédiate du crédit à l’égard de l’autre. Il faut, en effet, distinguer le codébiteur solidaire de la caution. Pour ce qui concerne la solidarité, les effets secondaires sont régis par la loi (article 1205 et suivants du Code civil). Notre droit ne prévoit pas que la déchéance du terme à l’égard d’un des codébiteurs entraîne le même effet à l’égard des autres.

 

Par ailleurs, le règlement collectif de dettes ne constitue pas en soi un défaut de paiement même si le créancier est admis à déclarer la totalité de sa créance. Le juge peut autoriser la poursuite des remboursements d’un crédit, si c’est conforme à l’objectif de la loi de maintenir la dignité humaine. C’est le cas, par exemple, du paiement du crédit servant au financement du véhicule indispensable à l’exercice de l’activité professionnelle ou du crédit hypothécaire.  De même, le codébiteur qui n’est pas en règlement collectif, peut poursuivre seul l’exécution du crédit pour éviter de devoir faire face à l’exigibilité de la totalité du prêt.

 

A l’égard du débiteur qui n’est pas en règlement collectif, le prêteur doit respecter les articles VII.105 et suivants du Code de Droit Economique qui régit les clauses résolutoires et leur mise en œuvre.

 

La résolution du contrat de crédit et l’enregistrement du requérant à la Centrale des Crédits aux Particuliers sont donc intervenus irrégulièrement. Le prêteur est invité à mettre fin à la cession de rémunération et à établir le décompte des sommes dues à ce jour en imputant sur les mensualités prévues par le tableau d’amortissement initial, les paiements intervenus depuis le 1er juin 2015. Il pourra, ensuite, si des sommes restent dues mettre en œuvre la procédure de résolution dans le respect des règles légales. L’enregistrement du requérant auprès de la banque Nationale devra être supprimé compte tenu de cette rectification. Le prêteur devra prendre à sa charge tous les frais et charges réclamés du fait de la résolution intervenue à tort.

 

IV. CONCLUSION DE L’OMBUDSMAN

 

Au vu de ce qui précède, des discussions entre les experts, et de l’analyse approfondie effectuée, l’Ombudsman rejoint la position des experts et considère que la résolution du contrat de crédit et le fichage sont intervenus irrégulièrement.

 

La demande du requérant paraît donc fondée et, en conséquence, l’Ombudsman invite la banque à :

 

- mettre fin à la cession de rémunération,

 

- établir le décompte des sommes dues à ce jour en imputant sur les mensualités prévues par le tableau d’amortissement initial, les paiements intervenus depuis le 1er juin 2015. Ensuite, si des sommes restent dues, la procédure de résolution pourrait, le cas échéant, être engagée à l’égard du requérant dans le respect des règles légales.

 

 

- supprimer l’enregistrement du requérant auprès de la banque Nationale compte tenu de cette rectification.

 

- prendre en charge les frais et charges réclamés du fait de la résolution intervenue à tort.