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Crédits hypothécaires – Sûretés

 

2016.2347

 

THEME

 

Crédits hypothécaires – Sûretés

 

AVIS

 

Présents:
Monsieur A. Van Oevelen, Président;

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président

Messieurs E. Struye de Swielande, L. Jansen, membres

Mesdames M. Mannès, N. Spruyt, membres.

 

Date : 8 novembre 2016

 

 

1.       VOTRE PLAINTE

 

Le 12 février 2016, la requérante a reçu un courrier émanant de la banque lui annonçant sa décision unilatérale de mettre fin à la relation bancaire qui la liait.

 

Tous ses comptes ont été clôturés et elle ne conteste pas cette clôture même si cette décision l’a surprise. En revanche, elle soulève la question suivante : elle avait contracté un prêt hypothécaire avec la banque et ce prêt a été entièrement remboursé en 2014 à son échéance finale mais la mainlevée de l’inscription hypothécaire n’a pas été réalisée et elle subsiste donc toujours au profit de la banque.

 

Elle considère que du fait de la résiliation unilatérale de la relation bancaire dans le chef de la banque et du remboursement intégral du prêt, et du solde de tous les comptes entre parties, la banque, qui est à l’initiative de cette rupture de relation, doit renoncer à son droit d’hypothèque et procéder à un acte de mainlevée hypothécaire à ses frais.

 

2.       POSITION DE LA BANQUE

 

La banque relève qu’il s’agit d’un prêt hypothécaire et non d’une ouverture de crédit hypothécaire. Le prêt a été totalement remboursé en 2014 mais lorsqu’une inscription hypothécaire est prise, elle l’est pour une durée de 30 ans, quelle que soit la durée de l'emprunt. Si le remboursement a lieu avant l'expiration de ce délai de 30 ans, l'hypothèque subsiste, et elle ne disparaîtra avant ce délai qu'avec l'accord du créancier consigné dans un acte de mainlevée et moyennant le débours de frais à charge du client.

 

En pratique, la mainlevée d'une hypothèque n’est indispensable que si le propriétaire d'un immeuble le vend, ou s'il désire à nouveau hypothéquer son immeuble. Dans ce cas, les frais de mainlevée sont toujours à charge du client.  Dans les autres cas, il peut paisiblement attendre l'expiration du délai de 30 ans, et l'hypothèque disparaîtra automatiquement, sans aucun frais.

 

La banque considère que s’agissant d’un prêt hypothécaire intégralement remboursé, l’inscription hypothécaire ne vaut plus rien et n’aurait pas pu être utilisée dans le cadre d’une reprise d’encours. Dès lors, la requérante n’a subi aucun préjudice du fait de ne plus être cliente de la banque et il ne revient pas à cette dernière de prendre en charge les frais d’un acte de mainlevée à cet égard.

 

La banque conclut qu’il n’existe aucun lien entre la rupture de relation et levée de la garantie.

 

 

3.       AVIS DES EXPERTS[1]

 

Le Collège d'experts a examiné les deux étapes consécutives afin de déterminer s'il y a eu faute de la banque :

 

« D'abord le remboursement du prêt :  en mars 2015, le notaire demande le décompte de remboursement définitif, pour obtenir mainlevée pure et simple de l'inscription hypothécaire à concurrence de 27.500 eur. La banque confirme son accord de mainlevée moyennant le remboursement d'une somme de 9064,40 eur, qui intervient le 16 mars 2015, et suggère même au notaire d'obtenir la radiation de l'inscription par le biais d'un certificat notarié unilatéral, prévu par l'article 92 de la loi hypothécaire, nettement moins cher qu'un acte de mainlevée. Le notaire pouvait donc choisir la voie de l'acte de mainlevée avec intervention de la banque ou le certificat unilatéral sans intervention de la banque mais il ne donne pas suite et le dossier en reste là.

 

A ce stade, il n'y a aucune faute de la banque dont l'accord sur la mainlevée était parfaitement explicite. C'est toujours le notaire qui demande la mainlevée en cas de remboursement d'un crédit ou d'un prêt et les frais sont toujours à charge du client. Le dossier ne comprend pas copie de l'acte de prêt ou des conditions générales d'octroi des crédits de la banque qui contiennent certainement un article relatif à l'imputation des frais de mainlevée à charge des clients mais les Conditions bancaires générales, à l'article 11 §1 y font aussi référence. Il n'appartient pas à la banque de prendre l'initiative des formalités de mainlevée ni de veiller à ce que le notaire y procède effectivement.

 

Ensuite la clôture de la relation : la banque a fait usage en février 2016 de l'article 11 de ses Conditions bancaires générales pour mettre fin à sa relation avec la plaignante.

 

A ce stade, il n'y a pas non plus de faute ni d'abus dans le chef de la banque.

 

La rupture de la relation intervient un an après le remboursement du prêt et ne lui est pas liée ; elle ne peut avoir pour effet d'inverser la charge des frais de mainlevée pour les faire supporter par la banque.

 

Le Collège souligne par ailleurs que le maintien de l'inscription hypothécaire, qui n'est pas imputable à la banque, n'entraîne pas non plus un dommage dans le chef de la plaignante.

 

En effet, l'hypothèque garantissait un prêt et non une ouverture de crédit, de sorte qu'il n'y a pas de possibilité de reprise d'encours ni d'utilisation de la notion d'hypothèque pour toutes sommes pour couvrir un quelconque autre engagement d'autant plus qu'il n'y a plus de relation bancaire. Si la plaignante souhaite vendre le bien ou obtenir un nouveau prêt ou crédit en consentant une hypothèque, elle devra faire procéder à la radiation de l'inscription existante et consentir une nouvelle hypothèque au profit d'un autre créancier et ces frais ne sont aucunement liés à la clôture de la relation avec la banque mais bien au fait que l'hypothèque garantissait un prêt et ne pouvait donc servir à garantir une opération ultérieure. Si la plaignante était restée en relations avec la banque et avait sollicité un autre prêt auprès de celle-ci, la situation aurait été la même sur le plan de la prise d'hypothèque et des frais de radiation et de nouvelle hypothèque.

 

En conclusion, le Collège estime qu'il n'y a pas de faute imputable à la banque, ni de dommage dans le chef de la plaignante de sorte qu'il n'y a pas de raison de donner suite à la demande de celle-ci   d'imputer à la banque les frais éventuels de radiation de l'inscription hypothécaire.

 

La plaignante peut attendre la péremption de l'inscription, en 2024. Si elle souhaite vendre le bien libre d'hypothèque ou emprunter en consentant une hypothèque en 1er rang, elle devra payer les frais de mainlevée, éventuellement en suggérant à son notaire de passer par le certificat hypothécaire, moins cher qu'un acte de mainlevée.

 

La plaignante pourrait aussi négocier avec son nouveau prêteur de ne pas devoir radier l'inscription subsistante sur base du remboursement complet intervenu en 2015 au profit de la banque et de l'impossibilité pour celle-ci de réutiliser l'hypothèque pour de nouveaux engagements éventuels. Dans ce cas, le Collège suggèrerait à la banque de confirmer le parfait remboursement de sa créance et l'impossibilité de consentir une reprise d'encours. Le nouveau prêteur pourrait alors bénéficier d'une inscription hypothécaire en second rang, qui aurait valeur d'un premier rang, sans frais de radiation dans le chef de la plaignante. »

 

4.       CONCLUSION DE L’OMBUDSMAN

 

Il ressort de l’analyse des experts qu’il n’y a aucune faute imputable à la banque ni aucun dommage dans le chef de la requérante. Sa demande doit donc être déclarée non fondée. Ceci étant, afin de satisfaire partiellement la requérante, l’Ombudsman invite la banque à confirmer le parfait remboursement de sa créance et l’impossibilité de consentir une reprise d’encours dans un document officiel dont la requérante pourrait, le cas échéant, se prévaloir à l’égard d’un tiers.

 

 


[1] Le collège s’est réuni le 8 novembre 2016 en présence d’A. Van Oevelen, M.-F. Carlier, N. Spruyt, M. Mannès,  E. Struye et  L. Jansen  et l’avis a été définitivement approuvé par les experts, le 21 novembre 2016.