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Crédits hypothécaires - Exécution du contrat - Enregistrement BNB

2020.308

THEME
Crédits hypothécaires - Exécution du contrat - Enregistrement BNB
AVIS

Présents :
Madame N. Spruyt; Messieurs R. Steennot, A. Guigui, membres;

Date : 16 juin 2020

1. LA PLAINTE
La requérante a contracté un crédit hypothécaire en 2018. Elle a toujours payé les mensualités tous les mois sans faute.

En septembre 2019, elle n’a pas payé la mensualité du crédit, en expliquant à la banque qu’elle vende le bâtiment et qu’elle signe les actes en décembre - janvier.
D’octobre jusque janvier, elle n’a pas manqué une mensualité.

Elle a reçu un courrier de la Banque Nationale stipulant qu’elle est fichée.

Elle n’aurait pas reçu une mise en demeure ou un recommandé, simplement un courrier simple.

Au lieu d’apurer la mensualité manquante avec les mensualités qui ont suivi, ils ne l’ont pas fait.

Elle demande d’examiner le dossier pour voir si le fichage pourrait être levé, en sachant qu’elle a entretemps remboursé la mensualité manquante et les intérêts et surtout que le crédit a été totalement remboursé en janvier 2020.

2 POSITION DE LA BANQUE

La banque remarque qu’elle n’a pas payé l’échéance du 01/09/2019 engendrant des intérêts de retard.
Ce retard n’a pas été remboursé sur un délai de 3 mois, entrainant un défaut de paiement.

La cliente a été informée de ces retards et des conséquences que cela pouvait engendrer par courriers des 16/09, 16/10, 18/11 et 16/12/2019, dont elle ne conteste pas la réception.

Les versements qu’elle a effectués en octobre et novembre ont d’abord permis de rembourser les frais et intérêts de retard puis les intérêts et l’amortissement de ses mensualités.
Au 06/12/2019, 3 mensualités étaient donc incomplètement payées et la banque a correctement communiqué ce défaut de paiement à la Centrale des Crédits aux Particuliers (CCP) de la BNB.

La banque est légalement obligée d’informer la CCP de tout défaut de paiement provoqué par trois échéances qui ont été incomplètement payés à leur terme.

Le 30/12/2019, suite à la régularisation de sa situation, la banque en a informé la CCP.
Ce fichage, même régularisé, sera encore conservé dans leur fichier pendant un an après régularisation et l’enregistrement sera effacé automatiquement au terme de ce délai.

Dès lors, la banque estime ne pas avoir commis de faute. La suppression de ce fichage ne peut pas être demandée car il est correct.

3 AVIS DES EXPERTS
D’abord, le collège veut remarquer qu’une clause contractuelle qui donne la possibilité à une banque d’imputer les paiements faits par le client à son gré crée un déséquilibre manifeste entre les droits et les obligations de la banque et du consommateur (et est nulle), parce qu’une telle clause n’est pas suffisamment claire (art. I.8, 22°, VI.82 et VI.84 CDE). Comme, la Cour de Justice a décidé à plusieurs reprises (par exemple dans les affaires Arpad Kasler en Gutierrez Naranjo), le consommateur moyen doit être dans la possibilité de connaître les conséquences économiques et juridiques des clauses contractuelles. Tel n’est pas le cas quand la banque n’indique pas comment l’imputation des paiements peut s’opérer.

L’article 1253 du code civil implique que, sauf clause contraire, le débiteur de plusieurs dettes a le droit de déclarer, lorsqu'il paye, quelle dette il entend acquitter. Quand il ne fait pas une telle déclaration (et en absence des accords contraires), l’article 1254 du Code Civil s’applique. L’article 1254 CC statue : « Le débiteur d'une dette qui porte intérêt ou produit des arrérages, ne peut point, sans le consentement du créancier, imputer le payement qu'il fait sur le capital par préférence aux arrérages ou intérêts; le payement fait sur le capital et intérêts, mais qui n'est point intégral, s'impute d'abord sur les intérêts ».

C’est cette règle que la banque a appliquée dans ce dossier. Elle en a informé la cliente à plusieurs reprises par lettre.

En ce qui concerne la notification à la Centrale des Crédits aux Particuliers, l’article 5 §1 de l’arrêté royal du 23 mars 2017 réglementant la Centrale des Crédits aux Particuliers, détermine qu’un défaut de paiement doit être enregistré dans la Centrale après trois montants de terme restés impayés à leur échéance ou l’ont été incomplètement.

Dans ce dossier et compte tenu de l’imputation fait par la banque conformément à l’article 1254 CC, les mensualités d’octobre, novembre et décembre n’ont pas été payées complètement au moment de la notification. Le montant échu au moment de la notification était 1811,15 euro, soit 2.1 fois la somme d’une mensualités (une mensualité étant 855,47 euro).
En conclusion, le collège est d’avis que dans ce dossier, la banque n’a pas commis une faute en notifiant le 6 décembre 2019 la Centrale des Crédits aux Particuliers.


4. CONCLUSION DE L’OMBUDSMAN
La requérante a omis de payer une mensualité. Puis elle a repris le paiement normal des mensualités, mais les frais et intérêts engendrés par le non-paiement du mois de septembre ont eu comme conséquence qu’elle a été fichée auprès de la Banque Nationale en décembre, puisque la banque a utilisé ses paiements suivants pour apurer les intérêts et les frais d’abord, et puis seulement pour le remboursement du capital échu. Apparemment, elle ne s’attendait pas à être fichée si vite, puisqu’elle avait repris le paiement des mensualités normales.
L’Ombudsman estime que la banque n’avait pas bien informé ses clients concernant la façon d’imputer les paiements lorsqu’il y a du retard dans le paiement du crédit. Comme le Collège l’a remarqué, les conditions générales n’expliquent pas comment la banque procède dans ce cas.
La façon de procéder pourrait être constatée en lisant le décompte détaillé communiqué en annexe des lettres de rappel envoyées. Dans ces lettres, elle était aussi informée que la banque serait obligée de la ficher auprès de la Banque Nationale.
Le Collège confirme par ailleurs que la façon d’imputer les paiements est conforme à la loi.
Entretemps, le crédit a été entièrement remboursé. La banque a informé la Banque Nationale de la régularisation. Le fichage dit ‘passif’ disparaîtra automatiquement un an après la date de la régularisation.
L’Ombudsman recommande à la banque d’adapter ses Conditions Générales afin que les clients sont informés correctement des conséquences d’un retard dans le paiement d’un crédit et de la méthode d’imputation des paiements faits.