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Encaissement de chèques – opposition – formule d’encaissement convertie.

 

2012.0382

 

THEME

 

Encaissement de chèques – opposition – formule d’encaissement convertie.

 

AVIS

 

Présents :
Monsieur A. Van Oevelen, Président;

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président;

Messieurs F. de Patoul, E. Struye de Swielande, N. Claeys, L. Jansen, membres.
Madame M. Mannès, membre.

 

Date : 23 juillet 2013

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

Dans le cadre d’une relation internet, le requérant se voit remettre deux chèques, l’un de € 10.000 et l’autre de € 18.000, tirés sur des comptes ouverts auprès de banques situées à l’étranger. Il lui est par ailleurs conseillé de procéder à l’encaissement de ces chèques par l’entremise de la banque.

 

Le requérant se présente en début d’après-midi du jeudi 24 novembre 2011 auprès d’une agence de la banque. Il y sollicite l’ouverture d’un compte à vue et procède dans le même temps à la remise pour encaissement des deux chèques; la banque souligne que l’opération d’encaissement nécessitera un délai de minimum 10 à 15 jours.

 

Il est convenu que le produit de l’encaissement des chèques ne serait porté au crédit du compte du requérant qu’après leur encaissement effectif. Cette procédure de « Crédit après encaissement » est confirmée en toutes lettres sur les deux bordereaux de remise de chèques étrangers établis par la banque au moment de leur remise par le requérant.

 

En date du lundi 28 novembre 2011, la banque passe sur le compte à vue du requérant une écriture de crédit en compte, sous valeur 7 décembre 2011, pour un montant de € 9.979,20. L’avis de crédit relatif à cette écriture mentionne qu’il s’agit de l’encaissement d’un chèque étranger de € 10.000 après déduction de frais pour € 20,80 et que le crédit est réalisé « sous réserve de bonne fin ». Le solde du compte fait par ailleurs état d’un solde créditeur de € 9.979,20.

 

A partir du 2 décembre et ce jusqu’au 15 du même mois, le requérant ordonne des virements vers son compte auprès d’une autre banque pour un total de € 5.900, effectue un prélèvement en espèces pour € 3.500, et réalise divers petits paiements au moyen de sa carte de banque. L’ensemble de ces opérations ont eu pour effet de ramener le solde créditeur du compte à quasi zéro.

 

Le 16 décembre, la banque procède sur le compte du requérant à une opération de débit pour un montant de € 10.016,20. L’avis de débit indique qu’il s’agit d’un chèque de € 10.000, augmenté de frais, pour lequel un crédit sauf bonne fin avait été accordé mais retourné non-payé pour motif « Opposition sur chèque – Vol ».

 

L’opération d’extourne du 16 décembre a pour effet de mettre le compte à vue du requérant en situation débitrice. La banque a mis le requérant en demeure d’apurer le solde débiteur de son compte. Cette demande étant restée sans suite, la banque a décidé de mettre fin à la relation commerciale avec le requérant et a mandaté une société de recouvrement pour récupérer la somme de € 10.432,44 qui lui est redevable.

 

Le chèque étranger de € 18.000 remis le 24 novembre 2011 n’a jamais fait l’objet d’un crédit en compte. Il a été retourné au requérant en date du 9 janvier 2012 au motif que le compte du tiré était clôturé depuis le 26/9/2008. Seuls des frais à concurrence de € 117,49 ont été prélevés à charge du requérant.

 

Le point de vue du requérant

 

Le requérant entend obtenir réparation de la part de la banque au motif que celle-ci a commis une erreur en modifiant d’initiative une procédure d’encaissement des chèques convenue et confirmée lors de leur dépôt. Si la banque avait agi conformément à cette procédure, le requérant soutient que son compte n’aurait jamais été en débit.

 

Lorsque la banque a porté le chèque de € 10.000 au crédit de son compte en date du 28 novembre, le requérant a estimé que cette opération traduisait en réalité l’encaissement effectif et définitif du chèque, et qu’il pouvait par conséquent utiliser les fonds disponibles. Au moment même, il affirme ne pas avoir prêté attention à la mention sur l’avis de crédit d’encaissement sous réserve de bonne fin, d’autant plus que la banque n’a pas pris soin de le contacter pour l’informer de ce que l’avis de crédit ne signifiait nullement que le chèque avait été effectivement encaissé.

 

S’agissant de la clause « sous réserve de bonne fin », le requérant reproche en outre à la banque de ne pas avoir fait œuvre de prudence dès lors qu’elle aurait dû savoir que, au moment de l’ouverture du compte, son nom était repris depuis 2003 dans le fichier géré par la Banque Nationale pour cause de défauts de paiement sur prêts aux particuliers.

 

Le point de vue de la banque

 

La banque indique que c’est en raison d’une procédure interne de traitement requis pour l’encaissement du chèque de € 10.000 tiré sur un client d’une banque en France, qu’elle a dû prendre l’initiative de modifier la formule d’encaissement établie au départ pour ce chèque.

 

La banque soutient néanmoins que le crédit porté sauf bonne fin en compte du requérant suite à cette modification, et dont ce dernier a pu prendre connaissance sur base des informations fournies sur l’avis de crédit, ne pouvait en aucune façon être assimilé au résultat d’un crédit après encaissement. Une telle assimilation par le requérant était, selon la banque, d’autant moins justifiée que l’information lui avait été communiquée que l’encaissement des chèques allait prendre 10 à 15 jours minimum.

 

Lorsque le chèque lui a été retourné avec un statut d’impayé, la banque fait part de ce qu’elle a procédé à l’extourne de l’écriture de crédit sur bonne fin conformément aux dispositions prévues en la matière dans ses conditions générales.

 

Considérant n’avoir en l’espèce commis aucune erreur dans les traitements successifs intervenus à l’occasion de l’encaissement du chèque de € 10.000, la banque estime qu’elle ne doit pas dédommager le requérant du montant que celui-ci a perçu. Reconnaissant toutefois avoir converti d’initiative la formule d’encaissement, la banque soumet une proposition commerciale par laquelle elle est disposée à prendre en charge les intérêts débiteurs facturés au requérant de janvier à mars 2012, soit une somme de € 335,34.

 

II. AVIS DU COLLEGE

 

Le Collège est d’avis que le requérant a manqué de prudence lorsqu’il a pris connaissance du montant porté au crédit de son compte ainsi que des mentions contenues dans l’avis de crédit qui l’accompagnait. Intervenue à peine deux jours ouvrables après la remise du chèque pour encaissement à l’étranger, il devait, avant d’ordonner des paiements et des retraits d’espèces, s’interroger sur la nature de cette opération de crédit et ne pas en déduire qu’elle signifiait un dénouement définitif de l’encaissement. Cette prudence était d’autant plus de mise qu’une telle interprétation n’était pas conciliable avec les informations fournies par la banque sur le délai d’encaissement des chèques déposés par le requérant. Le Collège considère dès lors que le dommage invoqué par le requérant pouvait raisonnablement être évité s’il avait pris la peine d’interroger la banque sur la nature de l’opération de crédit portée à son compte.

 

Le Collège observe par ailleurs que la banque, dans ce cas particulier, s’est cantonné à un rôle de pure exécution, alors qu’il eût été indiqué de prendre contact avec le requérant pour attirer son attention sur la nature réelle de l’opération de crédit passée sur son compte.

 

III. CONCLUSION

 

Le Collège considère la plainte comme recevable, mais non fondée.

 

Le Collège invite la banque à donner suite à la proposition commerciale qu’elle a formulée.