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Envoi de carte par la poste, retraits et paiements frauduleux, charge du risque.

2010.2445

 

THEME

 

Envoi de carte par la poste, retraits et paiements frauduleux, charge du risque.

 

AVIS

 

Présents :


Messieurs A. Van Oevelen, Président;

 

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président,

 

Messieurs Y. Evenepoel, P. Drogné, N. Claeys, L. Jansen, W. Van Cauwelaert, C.-G. Winandy, membres.

 

Date : 15 mars 2011

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

Le 23/07/2008, le requérant demande le remplacement de sa carte bancaire défectueuse. Une nouvelle carte est envoyée à l’adresse de correspondance enregistrée dans les fichiers de la banque depuis fin 2005, à savoir Rebecq. Cette adresse est différente de l’adresse de domiciliation (Braine l’Alleud), enregistrée également dans les fichiers de la banque depuis fin 2007.

 

Le 01/08/2008, la nouvelle carte est utilisée pour opérer deux retraits frauduleux à Tubize : un rechargement proton de 5 EUR et un retrait de 380 EUR du compte d’épargne.

 

Le 04/08/2008, le requérant conteste les deux retraits et fait opposition sur sa carte qu’il déclare n’avoir jamais reçue. Une carte provisoire, avec un nouveau code secret, lui est alors remise.

 

Le 05/08/2008, la banque envoie une nouvelle carte, mais toujours à la même adresse de correspondance, à Rebecq. Le code secret de la nouvelle carte est le même que celui en vigueur sur la carte provisoire.

 

Le 11/08/2008, la nouvelle carte est utilisée frauduleusement pour effectuer deux retraits du compte à vue (20 et 500 EUR) et un retrait de 100 EUR du compte d’épargne.

 

Le 12/08/2008, le requérant modifie l’adresse de correspondance, à Rebecq, de façon à ce que son courrier soit dorénavant envoyé à son domicile, à Braine l’Alleud.

 

Le 13/08/2008, le requérant conteste les retraits, fait opposition sur sa carte et porte plainte à la police contre son ex-compagne.

 

Point de vue de la banque

 

La banque met en avant que l’adresse de correspondance a toujours été différente de celle du domicile officiel du requérant, laquelle a été modifiée à plusieurs reprises depuis l’ouverture de son compte. La banque ne pouvait dès lors pas deviner que le requérant avait quitté sa compagne. Elle rappelle à cet égard que le requérant est dans l’obligation de communiquer toute modification d’adresse de correspondance, comme prévu à l’article 3 des Conditions Générales auxquelles il a adhéré à l’ouverture de son compte.

 

Par ailleurs, la nouvelle carte envoyée à l’adresse de correspondance du requérant (Rebecq) n’a pu être utilisée par son ex-compagne, dans le cadre de la deuxième série de retraits frauduleux, que si celle-ci connaissait le nouveau code secret choisi par le requérant ou si celui-ci a repris son ancien code malgré le fait qu’il savait que son ex-compagne avait déjà retiré des fonds le 01/08/2008 (Tubize, où on été opérés les premiers retraits frauduleux, étant la commune voisine de Rebecq). En conséquence, compte tenu du manque de prudence flagrant du client qui ne fait rien pour protéger son code secret, même après avoir constaté les retraits litigieux du 01/08/2008, la banque refuse de lui rembourser les fonds retirés par son ex-compagne.

 

Point de vue du requérant

 

Le requérant indique que la banque connaît sa nouvelle adresse depuis au moins fin 2007. A cette époque, il a d’ailleurs demandé le transfert de tous ses avoirs à l’agence de sa nouvelle adresse (Braine l’Alleud).

 

Sur le bon de commande des nouvelles cartes figure l’adresse de domiciliation du requérant (Braine l’Alleud) et non pas l’adresse de correspondance (Rebecq).

 

La banque a donc commis une erreur en adressant les deux cartes à une mauvaise adresse.

 

Par ailleurs, le requérant affirme, dans le procès verbal d’audition à la police, ne jamais avoir communiqué le code secret de sa carte à son ex-compagne, celle-ci l’ayant probablement observé alors qu’il l’introduisait.

 

Le requérant réclame donc le remboursement du préjudice subi, à savoir 1.005 EUR en tout.

 

II. AVIS DU COLLEGE DE MEDIATION

 

L’article 6 de la loi du 17 juillet 2002 relative aux opérations effectuées au moyen d’instruments de transfert électroniques de fonds précise que la banque doit supporter les risques de tout envoi au client d’une carte bancaire, ou de tout moyen qui en permet l’utilisation.

 

En l’occurrence, le Collège constate que la banque a choisi d’envoyer les nouvelles cartes bancaires par voie postale. En optant pour ce moyen, elle doit donc assumer le risque que ces cartes soit interceptées par une autre personne que le requérant au cours de l’envoi. Or, d’autres moyens, plus sûrs, existent. Certaines banques exigent par exemple que les clients passent en agence pour retirer leurs nouvelles cartes.

 

Dans le cadre de ce dossier, les cartes ont été envoyées à la dernière adresse de correspondance connue, mais la banque ne prouve pas que le requérant les a bien réceptionnées. La banque doit donc prendre à sa charge, selon la loi, le préjudice subi par le requérant.

 

La banque met par ailleurs en avant le fait que le requérant ne l’a pas informée du changement d’adresse de correspondance, enfreignant ses conditions générales. L’article 12 de la loi du 17 juillet 2002 précise cependant qu’est interdite et nulle de plein droit :

 

  • toute clause par laquelle le titulaire renonce même partiellement au bénéfice des droits prévus dans la présente loi ;
  • toute clause par laquelle l’émetteur est exonéré même partiellement des obligations découlant de la présente loi.

 

La banque ne peut donc pas limiter sa responsabilité dans le préjudice qu’elle a causé parce que le requérant ne lui a pas communiqué sa nouvelle adresse de correspondance. Il appartenait à la banque de vérifier préalablement à l’envoi des nouvelles cartes que l’adresse reprise dans ses fichiers était toujours à jour. Certainement lorsque les fichiers prévoient deux adresses – une adresse de correspondance et une adresse de domiciliation – et que ces deux adresses ne correspondent pas. Certainement aussi lors du deuxième envoi, sachant que le requérant n’avait pas reçu sa première carte et que des retraits frauduleux avaient déjà été constatés.

 

La banque reproche enfin au requérant un manque de prudence flagrant pour protéger son code secret, même après avoir constaté les retraits litigieux du 01/08/2008. La banque se réfère ici à l’article 8, paragraphe 2, de la loi du 17 juillet 2002, qui traite de la négligence grave et de la responsabilité du requérant en cas de perte ou de vol de sa carte.

 

Le Collège estime toutefois que cette responsabilité ne peut être engagée qu’à partir du moment où le requérant est entré en possession de sa carte. Ce n’est pas le cas ici. La négligence grave ne peut donc être invoquée par la banque.

 

Quand bien même, la banque ne démontrerait pas que le requérant a fait preuve de négligence grave. D’une part, le requérant affirme ne jamais avoir communiqué son code secret à sa compagne et la banque n’apporte pas la preuve du contraire. La compagne a pu, par exemple, prendre connaissance du code secret à l’insu du requérant. D’autre part, la banque reproche au requérant un manque de prudence flagrant en choisissant le même code secret malgré le fait qu’il savait que son ex-compagne avait déjà retiré des fonds le 01/08/2008. Rien n’indique toutefois dans le dossier qu’au moment de commander la deuxième nouvelle carte, le 04/08/2008, le requérant avait déjà pris conscience que la première avait été envoyée à l’adresse de son ex-compagne et que celle-ci avait agi frauduleusement. Il apparaît plutôt qu’il s’en soit rendu compte le 12/08/2008 seulement, lorsqu’il change son adresse de correspondance avant, le lendemain, de porter plainte contre son ex-compagne.

 

III. CONCLUSION

 

Le Collège considère que la demande d’indemnisation du requérant est recevable et fondée. Il invite la banque à rembourser au requérant la somme de 1.005 EUR. La franchise de 150 EUR ne s’applique pas dans ce cas-ci.

 

La banque a suivi l’avis du Collège.