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Garantie locative.

2011.1914

 

THEME

 

Garantie locative.

 

AVIS

 

Présents :


Messieurs A. Van Oevelen, Président;

 

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président;

 

Messieurs F. de Patoul, E. Struye de Swielande, N. Claeys, L. JANSEN, membres


Mesdames N. Spruyt, M. Mannès, membres.

 

Date : 27 mars 2012

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

Le requérant a donné un bien en location à monsieur P., client de la banque. Pour constituer la garantie locative, monsieur P. a ouvert un carnet d’épargne avec affectation spéciale. La banque a pris acte de cette instruction qu’elle a consignée dans une convention qu’elle a remise à monsieur P., le locataire, pour être présentée par lui à la signature du bailleur et retournée ensuite à la banque afin d’être signée par elle.

 

Il semblerait que le document dont le requérant produit une copie signée par lui n’a pas été retourné par monsieur P. à la banque qui de son côté ne semble pas l’avoir réclamé.

 

Le 18 mars 2009, monsieur P. s’est présenté à l’agence muni d’un formulaire de déblocage de la banque autorisant le transfert de la totalité du dépôt sur un compte lui appartenant. Ce document est signé par le locataire et le bailleur mais la signature de ce dernier est un faux grossier. La banque a accédé à cette demande et versé le montant de la garantie locative sur le compte du locataire.

 

Le 1er septembre 2010, le requérant, bailleur, a signé avec son locataire une convention de déblocage de la totalité du dépôt au profit du bailleur. Il a ensuite invité la banque à lui verser la somme. Cette dernière s’y est refusée en raison du déblocage déjà intervenu dix huit mois plus tôt.

 

Le requérant considère que la banque a commis une faute en acceptant de libérer le dépôt sur base d’une signature grossièrement falsifiée. Il demande que la banque lui paie l’équivalent du montant déposé en carnet d’épargne majoré des intérêts.

 

La banque considère que selon la procédure en vigueur chez elle, la constitution de la garantie nait de la signature d’une convention par le locataire, le bailleur et la banque. Comme le document de constitution ne lui a jamais été retourné et qu’elle ne l’a jamais signé, la garantie n’a jamais pu prendre naissance. Le locataire était donc en droit de retirer les fonds à tout moment et la présentation d’un document de déblocage (certes falsifié) n’était donc même pas nécessaire pour qu’il puisse se faire remettre la totalité des fonds.

 

II. AVIS DU COLLEGE DE MEDIATION

 

La constitution d’une garantie locative pour un bail de résidence principale est régie par l’article 10 de la loi sur le bail de résidence principale.

 

Cette disposition précise : Lorsque le preneur opte pour un compte individualisé, la garantie locative ne peut excéder un montant équivalent à 2 mois de loyer. Les intérêts produits sont capitalisés au profit du preneur et le bailleur acquiert privilège sur l'actif du compte pour toute créance résultant de l'inexécution totale ou partielle des obligations du preneur.

 

Monsieur P. s’est présenté le 19 septembre 2005 auprès d’une agence de la banque pour y faire ouvrir un livret d’épargne à son nom. Il a déclaré vouloir soumettre ce livret d’épargne « au régime de l’art. 10 de la loi sur la location d’une résidence principale à titre de garantie pour assurer le respect par le locataire de ses obligations résultant du bail intervenu entre lui–même en date du 15/08/2005 relativement à un appartement sis Place *** à ***», selon les termes de la convention établie par la Banque le 19/09/2005.

 

La banque a pris acte de cette instruction qu’elle a consignée dans la convention précitée.

 

Dès ce moment, le carnet de dépôt est donc, selon les instructions du déposant acceptées par la banque, soumis au régime légal de l’article 10 de la loi sur le bail de résidence principale. Pour faire naître le privilège du bailleur, la loi n’exige aucune autre formalité supplémentaire que la déclaration unilatérale d’affectation spéciale par le locataire. Ainsi, l’écrit, la signature par le bailleur ou par la banque, ne sont pas requis par la loi.

 

Le Collège considère que l’absence de signature par la banque sur le document qu’elle utilise pour la procédure de notification au bailleur, est sans influence sur l’existence du privilège.

 

Dès lors qu’elle avait donné acte à son client de la constitution du privilège, la banque ne pouvait plus se dessaisir des sommes sans obtenir préalablement la confirmation du bailleur que le privilège n’avait plus d’objet.

 

Telle paraît d’ailleurs avoir été la position de la banque qui n’a accepté de libérer le carnet d’épargne que sur présentation du formulaire de déblocage. Malgré les explications fournies a posteriori par la banque, c’est bien ce document qui a été présenté pour obtenir la libération.

 

La signature falsifiée du bailleur n’a pas pu être détectée par la banque puisqu’elle ne disposait pas du spécimen de signature de celui-ci. A défaut d’en disposer, la banque aurait pu et dû utiliser d’autres moyens de contrôle (demander une copie de la carte d’identité, contrôle par téléphone, présence physique du bailleur à l‘agence, etc.).

 

Le Collège estime donc que la banque n’a pas agi en l’espèce avec la prudence que devait lui inspirer le régime légal de la garantie locative.

 

III. CONCLUSION

 

Le Collège considère que la demande est recevable et fondée. Il invite la banque à verser au bailleur le montant du carnet de dépôt majoré des intérêts calculés jusqu’au jour du versement.

 

La banque a suivi l’avis du Collège.