Vorige

Gestion opérationnelle compte titres.

 

2015.401

 

THEME

 

Gestion opérationnelle compte titres.

 

AVIS

 

Présents :
Monsieur A. Van Oevelen, Président ;

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président;

Messieurs E. Struye de Swielande, N. Claeys, L. Jansen, membres
Mesdames M. Mannès, N. Spruyt, membres.

 

Date : 16 juin 2015

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

Dans le cadre de la gestion opérationnelle du compte titres qu’il détient auprès de la banque, le requérant reçoit de celle-ci un courrier adressé en date du 27 juin 2014 et l’invitant à se prononcer sur son choix quant à l’augmentation de capital avec droits que la société S a ouverte du 26 juin 2014 au 11 juillet 2014. Détenant 16.500 actions S, le requérant se voit attribuer en compte un nombre équivalent de droits de souscription lui permettant de souscrire à 4.950 nouvelles actions S (rapport de trois nouvelles pour dix anciennes). A défaut de vouloir souscrire, le requérant est informé que les droits qu’il détient sont négociables sur un segment de la plateforme de négociation Euronext-Paris du 26 juin au 11 juillet 2014. Le courrier contient par ailleurs un bulletin réponse permettant de choisir entre deux options : soit souscrire à l’augmentation de capital à raison d’une partie ou de la totalité des droits crédités, soit ne rien faire pour la partie des droits non utilisés. Le bulletin réponse doit être signé et retourné à la banque pour le 9 juillet à 10h au plus tard. En l’absence de réponse, la banque précise qu’elle n’effectuera aucune opération en rapport avec les droits. Il est à noter que le bulletin réponse n’offre aucune possibilité d’instruction quant à la négociation en tout ou en partie des droits attribués en compte, une opération de ce type devant par conséquent faire l’objet d’une instruction séparée.

 

Le courrier adressé par la banque est réceptionné au domicile du requérant dans la matinée du 1er juillet 2014. En date du vendredi 4 juillet, ce dernier transmet via la messagerie accessible sur le site public de la banque une instruction de souscription à 4.950 actions nouvelles S moyennant l’exercice des 16.500 droits crédités sur son compte. Dès réception de ce message, la banque a envoyé un courriel au requérant l’informant que son instruction de souscription devait être signée et qu’elle pouvait de la sorte être transmise par fax, par poste ou scannée via la messagerie de la banque. Le requérant déclare avoir donné suite le même jour à cette demande en signant le bulletin réponse et en le retournant à la banque par pli ordinaire.

 

Au terme de la période déterminée par la banque pour recevoir valablement des instructions, soit le mercredi 9 juillet à 10h00, le bulletin réponse dûment signé par le requérant ne lui était pas parvenu. Sa réception par la banque n’est intervenue que le vendredi 11 juillet dans la matinée et son traitement par le service ad hoc n’a été possible qu’en fin d’après-midi de la même journée, après clôture de la séance boursière.

 

En l’absence de bulletin réponse dûment signé et réceptionné endéans le délai imparti, la banque n’a pas procédé à l’instruction du requérant de participer à l’augmentation de capital par exercice de ses droits. Elle s’est par ailleurs abstenue de toute opération de négociation sur les droits.

 

Contacté à l’initiative de la banque le vendredi 11 juillet en fin de journée, le requérant est informé qu’en raison de la réception tardive du document signé reprenant ses instructions, il n’a pas été possible de procéder à la souscription d’actions nouvelles. Au cours de cet entretien ainsi qu’au cours d’une communication ultérieure, le même jour, la banque fait mention de la possibilité que les droits puissent encore être négociés en bourse le lundi 14 juillet, ou qu’ils puissent donner lieu à une indemnité par l’émetteur en raison de leur non-exercice.

 

En réalité, il s’est confirmé que les droits n’étaient plus négociables sur Euronext-Paris au-delà du 11 juillet et que le prospectus relatif à l’augmentation de capital S ne contenait aucune disposition prévoyant une indemnité pour droits non-exercés.

 

Le requérant observe le 22 juillet que les droits sont toujours portés au crédit de son compte –titres et valorisés à € 0.22 l’unité. Le 25 juillet, une écriture de débit de 16.500 droits est comptabilisée sans contrevaleur en espèces. Le requérant adresse le même jour à la banque une réclamation lui imputant la responsabilité de ne pas avoir exécuté ses instructions transmises par courriel en date du 4 juillet. La banque rejette la mise en cause de sa responsabilité et s’en explique dans deux courriers adressés au requérant les 3 et 10 octobre 2014.

 

Bien qu’insatisfait quant à la non-exécution de son ordre de souscription, le requérant n’évalue pas son dommage.

 

Point de vue du requérant

 

Le requérant s’étonne que les instructions non signées transmises par courriel concernant l’augmentation de capital S ne constituent pas un ordre valable et suffisant aux yeux de la banque, alors que ce procédé avait été accepté lors de l’augmentation de capital d’A suite à l’octroi d’un dividende optionnel. Il ne comprend pas davantage l’impératif d’une telle procédure alors qu’un simple ordre téléphonique avait suffi lorsqu’il s’était agi, un mois auparavant, de donner des instructions d’achat de 16.500 actions S pour une contrevaleur de l’ordre de € 50.000, soit un montant excédant largement le montant impliqué par l’augmentation de capital. Il ajoute enfin que son compte était suffisamment provisionné pour que l’opération soit exécutée.

 

Le requérant fait valoir à la banque qu’il n’a fait que suivre les instructions de transmission d’ordres recommandées par elle et qu’aucune faute ne pouvait dès lors lui être imputée en cette matière. En outre, si la banque reconnait avoir reçu son courrier le vendredi 11 juillet dans la matinée, le requérant se demande pourquoi il n’a été contacté par elle qu’après la clôture de la séance boursière.

 

S’agissant du calendrier imposé par la banque pour l’exécution de la souscription, le requérant fait observer qu’en établissant un courrier en date du 27 juin dont la réception ne se réalise que le 1er juillet, d’une part, et en prescrivant que toute instruction de souscription devait lui être communiquée pour le 9 juillet à 10h00, d’autre part, la banque en arrive à réduire de façon sensible la période de souscription et rend de ce fait plus aléatoire la bonne fin d’instructions transmises par courrier.

 

Point de vue de la banque

 

La banque souligne en premier lieu qu’elle a strictement appliqué la procédure interne mise en place pour cette augmentation de capital dont tous les aspects avaient été portés à la connaissance des clients par le courrier envoyé en date du 27 juin 2014. Le bulletin réponse accompagnant ce courrier prévoyait clairement que les instructions du client devaient être accompagnées de sa signature. Cette condition impérative a fait, en date du 4 juillet, l’objet d’un rappel explicite à l’attention du requérant aussitôt après que ce dernier ait fait connaître ses instructions de participation à l’augmentation de capital via la messagerie du site public de la banque. Le canal de transmission utilisé par le requérant n’offrait pas, selon la banque, des garanties suffisantes d’identification nécessaires à toute opération d’augmentation de capital pouvant porter sur des montants importants et susceptibles d’engager par ailleurs la banque si l’opération n’est pas menée à bonne fin. A cet égard, la banque réfute l’argument du requérant qui se réfère à une opération antérieure d’augmentation de capital liée à un dividende optionnel et pour laquelle aucune signature n’avait été demandée; une opération de cette nature comporte en effet moins de risques en raison des montants limités sur lesquels porte l’option laissée au bénéficiaire du dividende.

 

Parmi les choix de transmission d’instructions préconisés aux clients, la banque observe que c’est le requérant qui a choisi de confirmer ses instructions par pli postal ordinaire. La banque déclare ne pouvoir que regretter qu’un pli posté le 4 juillet par le requérant n’ait pu être réceptionné par la banque que le 11 juillet en matinée et traité dans des délais qu’elle juge raisonnable, ce qui exclut selon elle toute mise en cause de sa responsabilité à cet égard.

 

Quant à l’argument avancé par le requérant au sujet d’un raccourcissement de fait de la période au cours de laquelle le client est en mesure de réagir à une opération d’augmentation de capital, la banque fait observer qu’en raison de son statut de sous-dépositaire dans le cadre de l’opération S, elle était tenue de mettre en place un délai de réponse fixé au 9 juillet dès lors que son propre dépositaire lui avait imposé une limite au 10 juillet pour être à son tour en mesure de communiquer avec le dépositaire central de l’opération endéans l’échéance finale du 11 juillet fixée pour cette opération.

 

La banque tient en outre à préciser qu’il n’est pas évident d’évaluer l’impact financier résultant de la non–participation du requérant à l’augmentation de capital. S’il est vrai qu’une cession au premier jour de cotation des actions nouvelles aurait permis de dégager une plus-value à hauteur de € 3.415, la conservation de ces mêmes actions jusqu’en fin d’année 2014 aurait conduit à l’estimation d’une moins-value du même ordre.

 

II. AVIS DU COLLEGE

 

Le Collège observe que la banque n’a pas commis de faute au regard de la procédure qu’elle a mise en place pour l’opération d’augmentation de capital S. Il observe aussi que cette procédure était clairement exprimée à l’adresse des clients et que dès lors aucune ambiguïté ne pouvait exister quant au formalisme à respecter par le requérant dans le cadre de cette opération, a fortiori après qu’un aspect de cette procédure lui ait été en temps opportuns explicitement rappelé.

 

Le Collège ne partage pas l’argumentation exagérée produite par le requérant au sujet d’une amputation par la banque de 50% de la période de souscription par rapport à celle établie par le calendrier officiel. Il est en effet de pratique admise qu’un sous-dépositaire clôture en ses livres une opération de souscription un ou deux jours avant la clôture officielle pour lui permettre d’accomplir en temps voulus les formalités requises par son propre dépositaire et par le dépositaire central désigné pour cette opération de capital.

 

Le Collège est toutefois en droit de s’interroger sur le comportement très procédural de la banque alors qu’elle ne pouvait ignorer les intentions du requérant d’exercer ses droits dans le cadre de cette opération. Il relevait sans doute de son devoir de diligence à l’égard des intérêts du requérant de tenter de le contacter dès le 9 juillet pour, à défaut de souscription, lui donner l’opportunité de céder ses droits en bourse, ou encore , au cas où aucun contact ne pouvait être établi, de prendre l’initiative de valoriser ses droits sur le marché le dernier jour de cotation.

 

Par ailleurs, le Collège ne souscrit pas entièrement au raisonnement de la banque consistant à faire valoir que le requérant, par l’absence de souscription, n’a pas subi de perte mais uniquement un manque de gain potentiel : une telle argumentation fait l’impasse sur le fait que , en tant qu’actionnaire de S, il a été dilué sans avoir eu l’occasion de valoriser les droits que la société lui attribuait pour neutraliser cette dilution en tout ou en partie.

 

III. CONCLUSION

 

Le Collège considère la plainte, sur le plan juridique, comme recevable mais non fondée.

 

Toutefois, le Collège recommande à la banque, dans un esprit de médiation, de reconsidérer sa position au sujet d’un geste commercial en faveur du requérant. Un tel geste avait à un certain moment été évoqué par la banque, mais par la suite abandonné.