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Non exécution d’une opération de paiement–panne informatique–absence de force majeure–responsabilité objective de la banque.

 

2012.0453

 

THEME

 

Non exécution d’une opération de paiement – panne informatique – absence de force majeur – responsabilité objective de la banque.

 

AVIS

 

Présents :
Messieurs A. Van Oevelen, Président;

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président;

Messieurs F. de Patoul, N. Claeys, L. Jansen, membres.
Mesdames M. Mannès, N. Spruyt, membres.

 

Date : 18 septembre 2012

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

A. Les faits

 

  1. Le 17 novembre 2011, le requérant tente en vain d’effectuer un paiement par internet au moyen de sa carte de banque pour profiter d’une offre promotionnelle et réserver deux places pour un vol Bruxelles-Manille.
  2. N’ayant pu payer, il a dû se résoudre à acquérir ultérieurement des places sur un vol moins cher mais dans des conditions de confort nettement moindres.
  3. Le requérant se plaint donc de n’avoir pu profiter de l’offre promotionnelle initiale en raison de la défaillance du système de paiement de la banque.
  4. Il a protesté auprès de la banque laquelle a admis qu’une panne informatique (hardware failure) avait rendu impossible pendant plusieurs minutes l’accès aux bases de données permettant les paiements électroniques.

 

B. Les arguments des parties

 

1. Les arguments avancés par le requérant :

S’il n’a subi aucun préjudice financier, le requérant estime qu’il est anormal que la banque ne propose aucune indemnisation, même symbolique. Il relève que si le client est en défaut ou en retard d’exécuter ses obligations, des frais et des pénalités sont prévus. Il ne trouve pas équitable qu’aucune sanction ne soit prévue pour le cas où c’est la banque qui n’exécute pas ses obligations.

 

2. Les arguments avancés par la banque :

Pour la banque, la défaillance technique est un cas de force majeure. Conformément à l’article 1148 du Code civil, elle n’est donc pas tenue d’indemniser son client.

 

II. AVIS DU COLLEGE DE MEDIATION

 

La banque n’invoque aucune disposition contractuelle qui préciserait la portée de la force majeure. Elle se fonde donc sur le droit commun. Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, la force majeure ne peut résulter que d’un événement indépendant de la volonté humaine que l’homme n’a pu prévoir ou prévenir. Le caractère insurmontable doit s’apprécier in abstracto, en ce sens qu’il s’imposerait à tout débiteur de la même obligation placé dans les mêmes conditions. La charge de la preuve de la force majeure incombe à celui qui se prétend libéré de son obligation, soit en l’occurrence, la banque.

 

Le Collège considère qu’en l’espèce, la banque ne rapporte pas la preuve de la force majeure. Une défaillance des équipements informatiques n’est pas en soi un cas de force majeure dès lors qu’un tel incident est prévisible et qu’il existe des dispositifs qui permettent d’assurer la continuité du service aux clients.

 

En l’occurrence et à défaut de preuve contraire, le Collège considère que le système informatique de la banque ne comportait pas les dispositifs adéquats pour assurer la continuité du service et, à tout le moins, pour informer le client de l’incident et de la durée nécessaire pour la restauration du système.

 

Le Collège relève d’ailleurs que l’article 61.1. du règlement général de la banque prévoit que la Banque est responsable pour la non-exécution ou l’exécution erronée de transactions effectuées à l’aide d’un Instrument de paiement, sur des appareils, terminaux ou équipements acceptés par la Banque et sur lesquels elle exerce une surveillance ou non. L’article 61.2. énonce par ailleurs que Lorsque la banque est responsable, elle indemnisera le Client immédiatement. Ces dispositions transposent en réalité dans le champ contractuel le prescrit des articles 50, §1er et 52 de la loi du 10 décembre 2009 relatives aux services de paiement.

 

Le requérant pouvait donc légitimement attendre de la banque qu’elle reconnaisse sa responsabilité au lieu de se retrancher derrière la force majeure.

 

Le requérant admet qu’il n’a pas subi de préjudice financier mais avance le fait qu’il n’a pu voyager aux conditions de confort annoncées dans l’offre promotionnelle qu’il voulait accepter.

 

Le Collège estime que l’indemnisation de la perte de cet avantage indirect relève plus de la politique commerciale de la banque que du contentieux de la responsabilité civile. La banque a estimé ne pas devoir proposer une indemnisation, même symbolique, et cette décision relève de son pouvoir d’appréciation.

 

III. CONCLUSION

 

La demande est recevable.

 

Le Collège estime que la banque est responsable de la panne de son système de paiements. Le Collège constate cependant que le requérant ne fait pas la démonstration d’un préjudice indemnisable.