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Vol de carte – sinistre similaire deux ans auparavant – pas de négligence grave.

2012.1308

 

THEME

 

Vol de carte – sinistre similaire deux ans auparavant – pas de négligence grave.

 

AVIS

 

Présents :
Monsieur A. Van Oevelen, Président;

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président;

Messieurs F. de Patoul, E. Struye de Swielande, N. Claeys, L. Jansen, membres
Mesdames N. Spruyt, M. Mannès, membres.

 

Date : 20 novembre 2012

 

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

Le 2 avril 2012, la requérante, alors âgée de 82 ans, se rend à l’agence de la banque située près de son domicile et effectue deux retraits de 200,00 € chacun à 11h41 et 11h47.

 

Vers 13h00, elle procède à des achats dans une grande surface située à proximité de l’agence de la banque et de son domicile. Elle n’y utilise pas sa carte bancaire.

 

Le même jour, des retraits d’argent pour 600,00 € et douze paiements de 60 € auprès de la STIB sont opérés au moyen de sa carte de banque. Le premier retrait qui a lieu à 13h47 est réalisé directement avec le bon code.

 

A 19h34, la carte de banque est bloquée à la suite d’un appel téléphonique de la requérante à Cardstop.

 

Le lendemain, 3 avril 2012, la requérante porte plainte auprès de la police pour le vol de son portefeuille (contenant 400,00 € et sa carte de banque) ainsi que pour l’utilisation frauduleuse de sa carte de banque, à concurrence de 1.320,00 €. Elle explique qu’elle présume que le vol a eu lieu à la caisse du magasin où elle faisait ses courses.

 

Point de vue de la requérante

 

La requérante sollicite l’intervention financière de la banque. Elle conteste avoir indiqué son code sur la carte bancaire ou dans son portefeuille ou encore l’avoir communiqué à un tiers.

 

Point de vue de la banque

 

La banque qui souligne être déjà intervenue financièrement pour des faits similaires survenus en janvier 2010, refuse toute nouvelle intervention au motif que la requérante n’a pas pris les mesures de prudence nécessaires. Elle soutient que la requérante a commis une négligence grave soit en communiquant son code, soit en utilisant un code facilement identifiable.

 

Elle en veut pour preuve l’existence d’un sinistre similaire survenu deux ans auparavant, l’utilisation immédiate du bon code ainsi que le laps de temps écoulé entre les derniers retraits non contestés et les opérations litigeuses. La pratique démontre, en effet, que les opérations frauduleuses ont généralement lieu dans les instants suivant l’utilisation par le titulaire de sa carte de banque. Elle relève, à cet égard, que le code secret n’a pas pu être épié lors du vol puisque la requérante n’a pas payé ses achats au moyen de sa carte de banque. Elle considère qu’il est impensable que les malfrats aient épié la requérante lors de la dernière utilisation, la suivent pendant plus d’une heure pour lui voler sa carte dans la grande surface et attendent encore quelques trois quatre d’heure pour effectuer les premiers retraits.

 

Elle en conclut que la requérante a soit communiqué son code, soit utilisé un code facilement identifiable.

 

II. AVIS DU COLLEGE D’EXPERTS DE OMBUDSFIN

 

L’article 31, § 2 de la loi du 10 décembre 2009 relative aux services de paiement précise que l’utilisateur de services de paiement prend toutes les mesures raisonnables afin de préserver la sécurité de sa carte et de son code secret.

 

L’article 37, § 1 de la même loi prévoit que le client supporte jusqu’à la notification faite de la perte, du vol ou de l’utilisation frauduleuse de sa carte, les pertes liées à toute opération de paiement non autorisée et ce à concurrence d’un montant de 150,00 €, sauf s’il a agi avec négligence grave ou frauduleusement, auquel cas le plafond prévu n’est pas applicable.

 

L’article 37, § 3 indique que la charge de la preuve en matière de fraude, d’intention ou de négligence grave incombe au prestataire de services de paiement. Pour l’appréciation de la négligence, le juge tient compte de l’ensemble des circonstances de fait. L’utilisation de l’instrument de paiement avec le code connu du seul utilisateur de services de paiement ne constitue pas une présomption suffisante de la négligence de celui-ci.

 

Dans sa décision, le Collège tient compte, comme la loi le prévoit pour le juge, de l’ensemble des circonstances de fait pour établir s’il y a eu ou non négligence grave de la part de la requérante.

 

Le Collège est d’avis, en l’espèce, que les éléments mis en exergue par la banque, pris isolément ou ensemble, n’emportent pas la preuve d’une négligence grave dans le chef de la requérante.

 

Il n’est, en effet, pas exclu que les voleurs aient épié la requérante lors du dernier retrait à l’agence de la banque et qu’ils aient ensuite attendu le moment le plus opportun pour lui dérober son portefeuille et sa carte de banque. Il est également parfaitement imaginable qu’ils aient fortuitement recroisé les pas de la requérante dans le grand magasin et décidé à cette occasion de lui dérober sa carte de banque dont ils avaient épié le code précédemment. Le temps écoulé entre le vol, situé vers 13h00, et la première utilisation frauduleuse, 13h47, n’est, quant à lui, pas particulièrement long si l’on prend l’hypothèse de voleurs circulant à pied et n’entendant pas utiliser la carte volée dans les parages immédiats du lieu du vol.

 

De même, l’existence d’une précédente expérience malheureuse similaire ne prouve pas en soi que la requérante aurait laissé son code à proximité de sa carte ou qu’elle utiliserait un code facilement identifiable.

 

A l’examen de l’ensemble des circonstances de faits, le Collège constate que la banque n’apporte pas la preuve de la négligence grave de la requérante.

 

 

III. CONCLUSION

 

Le Collège considère que la demande d’indemnisation de la requérante est recevable et fondée. Il invite la banque à rembourser à la requérante la somme de 1.170,00 € calculée comme suit :

 

- retraits frauduleux :           1.320,00 €

- franchise :                          150,00 €

- montant à rembourser :     1.170,00 €

 

La banque n’a pas suivi l’avis du Collège.