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Vol de carte au domicile du requérant – retraits frauduleux – négligence grave, appréciation des circonstances de fait.

2012.0229

 

THEME

 

Vol de carte au domicile du requérant – retraits frauduleux – négligence grave, appréciation des circonstances de fait.

 

AVIS

 

Présents :


Messieurs A. Van Oevelen, Président;

 

Madame M.-F. Carlier, Vice-Président;

 

Messieurs F. de Patoul, E. Struye de Swielande, N. Claeys, L. Jansen, membres.


Mesdames M. Mannès, N. Spruyt, membres.

 

Date : 17 avril 2012

 

I. OBJET DE LA CONTESTATION ET POINT DE VUE DES PARTIES

 

Le 1er juin 2011, le requérant, âgé de 41 ans et émargeant du CPAS, se rend en début de soirée à un repas d’anniversaire.

 

Il rentre chez lui, un appartement au dernier étage d’un immeuble situé dans un quartier populaire de Bruxelles, vers 3h00 du matin, et dépose son sac contenant son portefeuille sur le canapé du salon.

 

A son réveil vers 13h00, il constate que pendant son sommeil, l’appartement a été visité par un ou des voleurs. Son portefeuille a été ouvert. Ses cartes bancaire et de crédit et l’argent liquide ont disparu. D’autres objets comme un ordinateur, un IPod et un appareil photographique lui ont aussi été dérobés. Son colocataire, en voyage pour 48 heures, est également victime du vol.

 

A 14h10, le requérant appelle Card Stop pour bloquer ses cartes.

 

Des retraits frauduleux au moyen des deux cartes ont été opérés, le 2 juin 2011, à concurrence de 1.164,75 € avec sa carte bancaire et de 819,94 € avec sa carte Visa. Le premier retrait qui a lieu à 05h48 est opéré directement avec le bon code. La dernière transaction litigieuse a lieu à 13h17.

 

Il s’avère que :

 

  • le requérant utilise le même code secret pour ses deux cartes, étant sa date de naissance;
  • la dernière transaction opérée avec la carte bancaire, à savoir un retrait à un distributeur, remonte au 1er juin 2011 à 20h18;
  • à l’époque, un campement de contestataires est installé sur la place en face de l’immeuble du requérant depuis plusieurs jours et draine, dans le quartier, une population hétéroclite qui fréquente l’épicerie située au pied de cet l’immeuble;
  • le requérant a déposé plainte auprès de la police et un dossier répressif a été ouvert;
  • à la suite des retraits frauduleux, le compte bancaire du requérant présente un solde négatif et a été bloqué par la banque.

 

La compagnie d’assurance habitation du requérant a couvert le sinistre.

 

Le requérant sollicite l’intervention financière de la banque pour l’utilisation frauduleuse de sa carte bancaire. Il affirme n’avoir noté son code secret nulle part et explique qu’il a dû être espionné, dans son quartier, lors d’une des dernières transactions qu’il a opérées au terminal en face de chez lui.

 

La banque décline son intervention au motif que le requérant a commis une négligence grave qui l’exonère de prendre en charge cette perte financière. Elle souligne à cet effet que le vol a été commis sans effraction, la porte de l’appartement n’étant pas fermée à clef, et que le tiers qui s’est emparé des cartes a pu prendre connaissance du code PIN car dès la première tentative, le bon code secret a été utilisé.

 

II. AVIS DU COLLEGE DE MEDIATION

 

L’article 31, § 2 de la loi du 10 décembre 2009 relative aux services de paiement précise que l’utilisateur de services de paiement prend toutes les mesures raisonnables afin de préserver la sécurité de sa carte et de son code secret.

 

L’article 37, § 1 de la même loi prévoit que le client supporte jusqu’à la notification faite de la perte, du vol ou de l’utilisation frauduleuse de sa carte, les pertes liées à toute opération de paiement non autorisée et ce à concurrence d’un montant de 150,00 €, sauf s’il a agi avec négligence grave ou frauduleusement, auquel cas le plafond prévu n’est pas applicable.

 

L’article 37, § 3 indique que la charge de la preuve en matière de fraude, d’intention ou de négligence grave incombe au prestataire de services de paiement. Pour l’appréciation de la négligence, le juge tient compte de l’ensemble des circonstances de fait.

 

Il mentionne cependant que l’utilisation de l’instrument de paiement avec le code connu du seul utilisateur de services de paiement ne constitue pas une présomption suffisante de la négligence de celui-ci.

 

Le Collège estime, au vu des circonstances de fait, que le requérant n’a pas fait preuve de négligence grave.

 

Le vol a eu lieu dans son domicile. Le domicile étant un espace privé, le requérant était libre de déposer son sac contenant ses cartes où il l’entend, ce que la banque ne conteste au demeurant pas.

 

Si le requérant a précisé que la porte d’entrée de l’immeuble se rabattait mal, rien ne permet d’affirmer qu’il aurait négligé de refermer cette porte à son retour. Il ne peut être tenu pour responsable du comportement éventuellement négligeant des autres occupants de l’immeuble.

 

Quant à la porte de l’appartement, si elle n’était pas fermée à clef, il n’apparaît pas qu’elle était ouverte. Le requérant explique que le ou les voleurs ont également pu pénétrer dans l’appartement par la fenêtre des toilettes. La porte d’entrée de l’immeuble se devait par ailleurs d’être fermée.

L’absence d’effraction pour pénétrer dans l’appartement du requérant ne témoigne pas, en l’espèce, d’une négligence grave dans son chef.

 

De même, choisir sa date de naissance comme code PIN pour ses différents instruments de paiement n’est pas en soi une négligence grave. Les combinaisons entre le jour, le mois et/ou l’année sont du reste multiples.

 

En l’espèce, au regard du bref délai écoulé entre la dernière utilisation de la carte bancaire et le premier retrait frauduleux et l’absence de fouille de l’appartement, il est parfaitement plausible que le requérant ait été observé, son domicile repéré et son code secret épié et ce d’autant plus que de nombreux individus fréquentaient son quartier à l’époque du vol.

 

Le requérant évoque également le vol de sa carte visa qui paraît avoir été également utilisée après le vol. Il ne formule cependant aucune demande spécifique.

 

Le Collège estime que ce grief, à supposer qu’il soit confirmé, devrait être réglé de la même manière.

 

III. CONCLUSION

 

Le Collège considère que la demande d’indemnisation du requérant est recevable et fondée.  Il invite la banque à rembourser au requérant la somme de 1.014,75 € calculée comme suit :

 

  • retraits frauduleux : 1.164,75 €
  • franchise :    150,00 €
  • montant à rembourser : 1.014,75 €
  •  

La banque a suivi l’avis du Collège.