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Duplicaat van Compte à vue (généralités), Compte à vue (généralités), Conditions générales (autres)

2022.721
THEME
Compte à vue (généralités), Compte à vue (généralités), Conditions générales (autres)
AVIS

Présents
Madame Françoise Sweerts, Président
Madame N. Spruyt; Messieurs R. Steennot, A. Guigui, P D’Haen, J. Vannerom, membres;

Date : 17 mai 2022

1. LA PLAINTE
La Requérante a introduit une plainte à l’égard de la banque car :

Suite à sa séparation avec son ex-compagnon, la banque a permis à ce dernier de changer les limites de transaction sur ses comptes communs sans son accord. Cela a ensuite permis à son ex-compagnon de transférer en une fois la somme de 140.000 euros de son compte commun vers un compte dont il est le seul titulaire, auprès d’une autre banque.

Or, 3 à 4 semaines avant les faits, elle avait téléphoné au Help Desk de la banque afin de signaler qu'il y avait des problèmes dans le couple et elle demandait de bloquer le compte d'épargne en attendant que la situation s’améliore.

La banque a refusé sa demande prétendant que pour cette opération les deux signatures (la sienne et celle de son ex-conjoint) étaient nécessaires.

Elle a adressé une plainte à la banque afin de demander de rectifier la situation mais la banque n’apporte pas de solution concrète et se limite à lui dire que la banque souhaite que la situation s’améliore.

Elle ne trouve pas la situation normale et souhaite une intervention d’Ombudsfin.

2 POSITION DE LA BANQUE
La Requérante contacte Ombudsfin car elle n’est pas d'accord avec la position de la banque dans le traitement de sa plainte.

Son ex-partenaire a fait augmenter le plafond de son compte bancaire sur Internet sans son accord, ce qui lui a permis de transférer 140.000 euros sur son propre compte. Elle affirme également que la banque a refusé de bloquer le compte joint sur la base de sa demande téléphonique, car celle-ci nécessitait sa signature et celle de son partenaire.

Elle fait référence à une conversation avec le service d'assistance de la banque. L'enquête montre que cette conversation a eu lieu le 11 décembre 2021. Elle a contacté l’Helpdesk de la banque, mais ce service fournit un support technique pour les applications numériques de la banque. L'employé de l’helpdesk lui a donc mis en relation avec un employé de la banque Live.

Après écoute de cette conversation qui a duré un peu plus de 5 minutes. Il apparaît qu’elle avait 3 questions :

- Quelle est la limite pour les transferts via la banque en ligne ?
- Pouvez-vous faire bloquer les comptes joints ?
- Son partenaire peut-il transférer de l'argent du compte d'épargne commun vers son compte ?

Situation :

La Requérante et son partenaire avaient un compte d'épargne et un compte courant à ses noms communs. Ils ne sont pas mariés. Comme cette relation ne se passait plus bien, elle a contacté la banque par téléphone le 11 décembre 2021. Au début de cette conversation, elle mentionne qu'il y a des problèmes avec son partenaire. La conversation montre que l'employé est convaincu qu’ils étaient mariés, ce qu’elle ne réfute pas.

Elle explique la raison de son appel comme suit : « Ils sont toujours ensemble, mais c'est juste que pendant le divorce, il pourrait faire quelque chose avec ce compte et elle voudrait le sécuriser ". Après environ quatre minutes, elle répète que son intention est de régler les choses à l'amiable : « Parce que pour le moment, elle essaie de régler les problèmes à l'amiable. Donc il n'y a pas de tribunal, il n'y a pas de verdict. Ensuite, ils mettront peut-être tout sur papier, afin de parvenir à un accord entre eux ».

Limite des services bancaires par Internet

Au cours de l'entretien, l'employé de la banque Live l’a indiqué que la limite pour effectuer des virements via internet banking est de 25.000 euros en utilisant la carte bancaire et le lecteur de carte ou itsme®. Il s'agit de la limite standard qui s'applique à tous. Les clients peuvent également consulter eux-mêmes cette limite dans leur application bancaire en ligne.

Blocage du compte

Son deuxième requête était de bloquer le compte. L'employée de la banque lui a répondu qu’elle ne peut rien faire sans preuve de divorce et il l’a renvoyé vers son agence. L’employé a également déclaré qu'il fallait soit l'accord du partenaire pour bloquer le compte, soit une décision de justice. Cette information n'était pas correcte.

Un compte au nom de personnes non mariées est un compte indivis. Ce compte est soumis aux dispositions de l'art. I.8 et suivants des Conditions générales bancaires (CGB) qui s'appliquent à ce compte. Cela signifie qu'en principe l'accord de tous les membres de l'indivision est nécessaire pour effectuer des transactions, sauf si une procuration a été donnée conformément à l'article I.12.8 du CBG. Cela s'est produit dans ce cas lors de l'ouverture du compte. Grâce à cette procuration, chaque membre de l'indivision peut effectuer des opérations séparément. Cependant, chacun des mandataires du compte peut révoquer sa procuration (c'est-à-dire sans raison et sans que les autres parties aient à donner leur accord) et dès qu'un mandataire révoque sa procuration, tous les pouvoirs sur ce compte en indivision expirent automatiquement. Dans ce cas, la règle générale selon laquelle les signatures de tous les titulaires sont nécessaires pour effectuer des transactions sera rétablie. Cela signifie que ni la Requérante ni son partenaire ne peuvent effectuer de transactions séparément, mais que deux signatures sont requises pour chaque transaction.

Art. I.12.8 CGB : Sauf convention contraire expresse avec la Banque :
- les co-titulaires, les associés ou les représentants d'une société sans personnalité morale ou les représentants d'une association réelle, peuvent se donner des procurations entre eux ou à un ou plusieurs tiers. À cette fin, tous les co-titulaires, partenaires ou représentants doivent signer le document de procuration ;
- la procuration accordée par les co-titulaires, les associés ou les représentants d'une société sans personnalité morale ou les représentants d'une association de fait peut être révoquée par chaque co-titulaire, associé ou représentant agissant individuellement. Cette rétractation est réputée avoir été valablement effectuée à l'égard de tous les co-titulaires, partenaires ou représentants. Si les co-titulaires, les partenaires ou les représentants se sont donné des procurations les uns aux autres, la résiliation d'une procuration a également pour effet de mettre fin aux autres procurations accordées les unes aux autres.

L'article I.8.7 CGB prévoit également que chaque membre d'une indivision successorale peut mettre fin à l'utilisation d'instruments ou de canaux numériques par lesquels un membre peut disposer du compte.
Cette disposition concerne les voies bien définies qui ne doivent plus être utilisées par un membre de l'indivision. Cet article offre donc la possibilité, naturellement pour tous les membres de l'indivision, d'exclure de l'utilisation certains instruments de paiement.

Art. I.8.7 CGB : Tout membre d'une indivision et tout associé d'une société sans personnalité morale (telle qu'une société de personnes) peut, par demande unilatérale et écrite, mettre fin à l'utilisation d'instruments, tels que les cartes bancaires et de crédit, les canaux numériques de banque à distance et autres, avec lesquels un membre, un associé ou un mandataire peut disposer du compte au nom de l'indivision ou de la société sans personnalité morale.

L'employé avait l'impression qu’ils étaient mariés.

Dans ce cas, une autre réglementation contractuelle s'applique, à savoir l'art. I.9.2 CGB qui prévoit qu'en ce qui concerne un compte joint au nom de deux personnes mariées, la règle générale est que chaque conjoint peut agir séparément. Toutefois, chacun des conjoints peut, à tout moment, mettre fin unilatéralement à ce pouvoir de disposition séparé en adressant une demande écrite à l’agence. Ensuite, les transactions ne sont possibles qu'avec l'accord des deux conjoints.

Chacun des conjoints peut également demander unilatéralement la fin de l'utilisation d'instruments, tels que les cartes bancaires et de crédit, les canaux numériques, etc. qui permettent à l'autre conjoint de disposer uniquement du compte à son nom.

En d'autres termes, tant pour un compte détenu au nom d’un couple marié que pour un compte détenu au nom de deux partenaires non mariés, chaque titulaire peut toujours mettre fin séparément au pouvoir de disposition de l'autre titulaire, sans le consentement de ce dernier.

Naturellement, la banque regrette que des informations incorrectes lui aient été fournies. Toutefois, la banque estime pouvoir s'attendre à ce qu’elle ait fait d'autres recherches, par exemple auprès de son agence qui était mieux informé de sas situation ou auprès d'un conseiller juridique. La Requérante aurait également pu vérifier elle-même ses droits dans les Conditions générales bancaires.

En outre, la banque estime qu’il n'est pas certain que si elle avait reçu les informations correctes, elle aurait révoqué la procuration sur le compte.

Le lien de causalité entre les informations incorrectes fournies par l'employé et le préjudice qu’elle allègue n'a pas non plus été établi.

En ce qui concerne le préjudice, elle n’a apporté aucune preuve qu’elle subit un préjudice à hauteur de la moitié du montant transféré. En effet, il n'est pas établi qu’elle ait droit à la moitié de ce montant. En outre, s'il apparaît que l'un des partenaires dispose de plus d'actifs que ce à quoi il a finalement droit sur la base de la division des actifs, cela peut être compensé entre les ex-partenaires. La banque ne sait d'ailleurs pas si elle a entrepris des démarches auprès de son ex-partenaire ou de la banque vers laquelle Monsieur a transféré les avoirs, par exemple pour imposer une saisie conservatoire.

La banque ne sait pas comment la situation entre les deux partenaires a évolué entre le moment de l'appel téléphonique (11 décembre) et l'augmentation de la limite, suivie du transfert, par son ex-partenaire (27 décembre). Ce qui est sûr, c'est qu'il y avait largement le temps de prendre rendez-vous en agence.

Transfert du compte d'épargne commun

Les transferts d'un compte d'épargne conjoint vers un autre compte que celui des mêmes titulaires ne sont pas possibles. Si des fonds sont nécessaires à partir du compte d'épargne commun pour effectuer un transfert, cela ne peut se faire qu'en les transférant d'abord sur le compte courant commun. À partir de ce compte courant, des transferts peuvent ensuite être effectués vers d'autres comptes.

Décision :

La banque soutient qu’elle n'est pas responsable des conséquences négatives que la Requérante prétend avoir subies en raison du transfert effectué par son ex-partenaire.

La banque espère toujours qu’elle et son ex-partenaire pourraient régler ce litige à l'amiable.
3 POSITION DU COLLEGE
La Requérante et son compagnon disposent auprès de la banque d’un compte à vue et d’un compte d’épargne communs.

Le 11/12/21, Madame appelle l’Helpdesk qui la transfère à un collaborateur de la banque Live. Elle informe directement la banque qu’il y a des problèmes dans le couple (séparation) et demande de sécuriser les comptes communs. Elle demande 3 choses :

- Quelles sont les limites pour l’internet banking.
- Le blocage des comptes communs.
- Si Monsieur peut transférer seul vers un compte propre.
Le collaborateur répond que la limite standard de transfert sur internet banking est de 25.000 euros, mais ne lui donne aucune information sur les possibilités de modifier seul (un seul des co-titulaire) ladite limite. En ce qui concerne la demande de sécuriser les comptes, le collaborateur indique que l’accord des deux co-titulaires est nécessaire ou qu’il faut passer par le tribunal. Le collaborateur - suppose qu’il s’agit d’un couple marié mais ne vérifie pas le statut exact de la cliente. Il ne donne pas l’information essentielle que dans le cas d’une indivision (comptes communs dont les co-titulaires ne sont pas mariés), le mandat qui a été donné à l’ouverture des comptes peut être révoqué par un co-titulaire seul et donc que Madame peut effectivement, seule, supprimer le mandat.

Avis des experts :

La banque a clairement été informée le 11/12/21 des problèmes dans le couple et de la demande de Madame de sécuriser/bloquer les comptes communs.

La réponse de la banque n’était pas adéquate : elle aurait dû directement informer Madame sur la procédure à suivre pour révoquer le mandat sur les comptes communs. Ce faisant, Monsieur n’aurait pas eu la possibilité d’effectuer, 3 à 4 semaines plus tard, un transfert de 140.000 euros à partir des comptes communs sur son propre compte.

C’est à tort que la banque invoque le fait que la cliente pouvait elle-même consulter les conditions générales pour rechercher comment révoquer le mandat ou bloquer l’accès au compte alors que l’information aurait dû être clairement fournie par le collaborateur lors de l’entretien téléphonique du 11/12/2021.

Les experts estiment que les réponses inadéquates et fautives données par la banque le 11/12/2021 sont directement à l’origine du préjudice subi par la Requérante. La banque a en outre manqué à son devoir de prudence/vigilance dans la protection des avoirs qui lui sont confiés, au vu de la situation du couple clairement renseignée lors de l’appel téléphonique du 11/12/2021.

Afin de réparer le dommage, les experts proposent d’inviter la banque à accompagner et aider la Requérante dans les mesures à prendre pour remettre les choses en pristin état (retour sur le compte commun des 140.000 euros), sans frais supplémentaires à charge de Madame.

A défaut d’arriver à remettre le compte en l’état du 11/12/2021, endéans les 3 mois, la banque est invitée à dédommager la Requérante du préjudice subi. A cette fin, il appartient à elle de prouver son préjudice, à savoir son droit sur la part des comptes communs qui lui aurait été attribuée si les comptes communs avaient été effectivement bloqués le 11/12/2021.

4. CONCLUSION DE L’OMBUDSMAN
L’Ombudsman invite donc la banque:
- A la soutenir (via son aide et son accompagnement actif) dans ses démarches afin de remettre la situation du compte en pristin état.
- A prendre à sa charge l’entièreté des frais que cela pourrait engendrer, en ce compris les frais d’avocat qui seraient nécessaires à cette fin.
- A la dédommager du préjudice subi si, dans un délai de 3 mois, les démarches n’ont pas permis de remettre le compte en l’état duquel il se trouvait à la date du 11/12/2021.
Dans l’hypothèse où la banque devrait l’indemniser, il l’appartiendra d’apporter la preuve du montant qui devait la revenir sur le compte commun si celui-ci avait été bloqué en date du 11/12/2021.
La banque dispose d’un délai d’un mois pour faire part de son intention.